Wednesday 1 September 2010

Là où je dois être


 
Je suis là où je dois être. Je l'ai toujours été. Je le serai toujours, s'il plaît à Dieu.
J'ai vogué sur toutes les mers, navigué sur tous les océans, j'ai goûté leur sel. J'ai traîné mes guêtres sales sur les six continents de notre globe, j'ai vu tout ce qu'il y avait à voir sur cette terre, de Pétra au Pôle sud en passant par l'île de Pâques. Aucun pays qui n'ait vu mon ombre, aucun pays dont je n'ai vu un lever et un coucher de soleil. Aucun endroit où je n'ai laissé une quelconque trace de mon passage. J'ai traversé tous les déserts, fait couler leur sable entre mes mains. J'ai senti tous les vents de ce monde sur mon visage. Gravi toutes les montagnes. J'ai vécu tout ce qu'il y avait à vivre ici-bas. J'ai parlé à toutes les nationalités, il n'existe aucune langue dont je ne connaisse pas ne serait-ce qu'un mot. J'ai lu tout ce qui a été écrit depuis que l'homme sait s'exprimer, je lis encore tout ce qui est digne d'intérêt. J'ai voyagé par tous les moyens de locomotion disponibles. Je suis allé sur la lune. Je connais tous les types de pierre de cette terre. J'ai récolté tous les onguents et tous les remèdes. J'ai écouté tous les chants anciens et nouveaux, joué de tous les instruments. Je crois en le dénominateur commun présent dans toutes les religions. J'ai goûté tous les mets de main d'homme, bu tous ses breuvages, cueilli et mangé toutes les plantes qui pouvaient l'être, tous les fruits et tous les légumes. Tué et mangé au moins un animal de chaque espèce, écrasé chaque type d'insectes, brûlé toutes les essences d'arbres. J'ai senti et piétiné toutes les fleurs. J'ai construit une maison, j'en ai détruit mille. J'ai fait toutes les guerres de ma génération. J'ai vécu les tremblements de terre, les typhons, les tempêtes, les éruptions volcaniques. J'ai été foudroyé, empoisonné, brûlé, cancéreux, cachectique. J'ai vécu le célibat, le mariage, la paternité. J'ai tué un homme, une femme, un enfant.
Je suis en prison, là où je dois être.
 

1 comment:

  1. Où est-ce que la philo mène ?...2 September 2010 at 20:43

    L'enfer est peut-être en chacun de nous, car nous sommes tous l'autre d'un autre soi...
    Les murs de notre conscience constituent à coup sûr une prison efficace, incapable qu'elle est de dépasser la finitude existentielle de cette enveloppe qui nous porte.
    Très beau texte aux airs de fable philosophique.
    Love it !

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