Monday 22 October 2007

Les Fouilles

Des enfants entament des fouilles

Au pied du rivage ;

Y trouveront-ils un compas rouillé,

La hune desséchée par le sel

D’un galion par la mer recrachée

Il y a quelques longtemps déjà.

Dans l’imbroglio du fracas des vagues,

Des cris stridents montants jusqu’au ciel,

Des vents ballotants les chevrons blancs,

Une étoffe d’artimon sans doute

Mise à jour dans le sable gras

Et ce soleil surplombant les parasols

Et les vagues inlassables s’échouant.

Certaines mains cherchent la fraîcheur

Du sable frais et crissant ;

D’autres plus fébriles creusent, pellettent,

Charrient coquillages brisées, algues cassantes,

Oxydations attirant l’attention

Puis un pleur

Que l’on ne reconnaît pas mais qui ramène

A la réalité de creuser plus profond,

Plus loin, d’explorer les entrailles du passé.

L’après-midi devra bien toucher à sa fin.

Carène, proue, misaine : tout sera découvert.

Sur la grand-vergue un squelette de nautile

Cramponné encore dans son geste de désespoir.

On cure les ongles des grains insidieux

Et la chasse reprend dans la chaleur hostile.

Une perle, un bijou, une monnaie battue

Par les tempêtes et les Gamas –

On ne rejette que le sable, le sable, le sable

Et l’étuve continue sans grand changement,

Autre que l’orbe blanchissant les nues.

Le cœur battant de découvertes

Qui n’arrivent pas, pas encore.

Bientôt la chaleur n’arrive plus au fond du trou

Et les frissons se partagent :

Le pressentiment du trésor

Et l’engourdissement des doigts.

Les enfants jouent avec leurs pelles et leurs seaux.

Il fait bon vivre à l’ombre de la tonnelle

Et l’eau mentholée fraîche et sucrée

Et un roman fermé ayant la capacité d’être lu.

Dans l’ombre tiède rien ne bouge.

Le vent de-ci de-là effleure les coins de serviettes

Et modèle des dunes de fourmis.

Rafales de sable à l’échelle un millième.

Ils s’imaginent que les passants s’intéressent

Un peu trop à leurs cailloux, leurs cordes élimées,

Les fragments de coques –

Lentement le bruit est retombé,

Les vagues ont chevauché l’horizon,

Les ciels se sont rosis, le froid insinué.

On finira par porter une petite laine.

Les enfants un à un seront rappelés.

On pourra humer les grands pins noirs.

Il ne finira par rester qu’un seul parasol.

Et une grande fosse béante.

Les traces de pas indiquent la grande ferveur

Qu’a suscité la fouille. Il y a eu découverte.

Pelles et seaux remplis de conques, d’astrolabes,

De cauris, de yatagans et d’armillaires.

Brisés ou non, rouillés ou non,

Ces objets racontent tous une histoire.

Jonchant le sol des cadavres d’épaves

Et, parfois, dans la bataille des estimations,

Une rareté qui finira ensevelie de nouveau.

Un squelette de nautile prit pour un banal coquillage.

Les rires d’enfants comme en écho

Sur la plage où seules les traces de pas

Font preuve de l’existence du lieu.

Il faudra plier bagage, ranger le livre,

Plier la serviette et le parasol, prendre la bouteille.

Il y aura comme un vent triste

Soufflant sur les dunes,

Un sentiment de frustration

A ne pas avoir prêté plus attention

Aux exagérations qui eurent lieu sur place.

Il a manqué quelque chose, encore.

Il faudra frotter les derniers grains de sable,

Ceux qui restent collés de sieste sur les joues,

Sur les mollets. On regardera le lointain bleu et rose.

On soupirera. Par curiosité on inspectera

Cette fameuse cavité qui a attiré maints regards,

Maintes interpellations.

Du bout de l’orteil on pourra déceler un de ces objets,

A-demi ensablé déjà, puis, en se penchant,

La peau tiraillée et grésillante

Gorgée de lumière et rougie,

Ramasser l’étrangeté marbrée.

On repensera à ces après-midi de clarté

Et de clameurs et de bruissements qui réconfortent.

A la tiédeur molle des eaux,

Au chatouillement du monde inconnu

Sous les vagues : crabes, algues, poissons, vers.

Et pourquoi pas autre chose.

On pourra repenser à tous ces corps

Qui enfin se libèrent des étoffes étouffantes.

Un sourire aux coins des yeux

On se rappellera un visage, des jambes,

Un maillot qu’un malin hasard mit de guingois.

Puis les lèvres retrouveront leur mise triste.

Pour se consoler on dévisagera le bibelot,

Sous toutes les spirales, puis

Un moment de lassitude mal interprété,

On fera ce qu’on a déjà fait, il y a trop longtemps déjà.

Il faudra apposer son oreille

Sur la bouche du nautile

Pour entendre le silence d’église

Résonner dans toutes les loges,

Ce silence particulier, rémanence,

Acouphène maritime

Ce silence qui se fit entendre

Au tréfonds de l’excavation –

Les Magellans de la plage de saint-Michel

L’entendirent et comprirent qu’ils devraient

L’oublier.

R.B. Dorceau 18/02/07 après-midi

2 comments:

  1. Sensations, parfums, images rêvées, vécues même, se bousculent !!!

    J'illustrerai ton texte, si tu le veux bien... Dans un temps indéterminé, trop de choses à faire ! ^^

    ReplyDelete
  2. Pas de problème, prends ton temps ma Chab

    ReplyDelete

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