Saturday 23 October 2010

Une petite envie d'écrire...

Il est cinq heures... Paris... euh non, Varennes s'éveille. Doucement. Enfin pas trop, il faut quand même que je prenne l'avion. La Maison Blanche m'attend.

Une fois de plus, pas assez dormi pour avoir les petites crottes jaunes et granuleuses comme du sable aux coins des yeux. Celles qui nous permettent de déterminer la qualité de notre sommeil selon leur grosseur.
Toast, thé, douche, brossage de dents, trousse de toilette dans le sac à dos. Fin prêt.
Il fait froid, et nuit. Belle gelée. Normal, me direz-vous, la lune pleine comme une outre trône encore dans le ciel noir comme la suie. Le trajet est morne, seuls quelques lapins de garenne effarés dans la lueur des phares. Pas âme qui vive dans les rues. Normal, me direz-vous, nous sommes à Chartres, et il est tôt.
Un peu plus de monde à la gare. Normal, me direz-vous, le train de 4h57 a été annulé. La salle des pas perdus est faite pour ça, non ?

Je regarde le tableau des départs, et je vois mon train, prévu à 6h57. Pas de souci, j'ai le temps, il n'est que 5h45 après tout. Sauf que je percute seulement plus tard, une fois assis et mon gros sac à dos posé à terre. "Mon" train de 5h57 est bel et bien annulé. Confirmation prise auprès du pauvre hère dans sa guitoune vitrée. "Il n'y en a pas un à 6h24, sur mon horaire il y a..." "Ah nan, pas aujourd'hui, demain." Ah, bon. La salle des pas perdus est faite pour ça, non ?

Une heure dans une gare courantdairisée plus tard, nous voilà tous, âmes frigorifiés et impatientes, dans le train. Nous apprendrons à patienter jusqu'à temps que l'on nous dise de descendre de ce train dont les portes... restent bêtement ouvertes, béates, gueules noires et froides ouvrant sur octobre noir.
Ce ne sera encore pas pour tout de suite. Pied-de-grue sur le quai numéro 2, dans la cohorte des vacanciers et des travailleurs. Dans le froid. Et nous pensons tous, car les gens se réchauffent comme ils peuvent - en fumant, en parlant, en grommelant -  qu'il fera bon être dans ce train, malgré le retard.
Car ce n'est pas tout ça, mais j'ai un avion à prendre, et j'ai beau avoir vu large, voire très large, je vais finir par être en retard. Retard, le mot est lâché, et la loi de Murphy sévit une fois de plus : "tout ce qui peut mal tourner, va mal tourner." Le train de 7h34 n'arrivera que six minutes plus tard, et se transformera en omnibus - et Ô combien cette transformation est funeste  pour nous autres pauvres mortels ! Il desservira donc toutes les gares jusqu'à la capitale, et cette information est capitale à n'en pas douter. Elle sonne le glas-glas sur ce quai de gare transi-bérien.

Mais le froid dans le courant d'air quai-sien n'est pas le pire ennemi, aussi invisible soit-il, et nous le découvrirons à nos dépens d'ici peu, nous qui nous époumonerions bien, nous raillerions bien cette société nationale des chemins de fer, que nous considérons pour le moment comme la pire des entités invisibles.

Et bonnant malant nous nous installons dans nos sièges spartiates. Et je remarque un des suppôts de l'Ennemi, vicieusement collé à la vitre. D'un ongle prudent je le tâte... du givre. L'heure et les vingt minutes de trajet seront longues, très longues, dans ce train que la grande société, dans son immense-uétude, n'a pas jugé bon de chauffer. On soufflera dans nos mains, on ramènera les bords de nos manches sur nos doigts gourds, on s'enfoncera dans nos cols, on se blottira les uns contre les autres. Mais rien n'y fera.

Il est presque neuf heures lorsque nous sortons de ce train-fantôme aux allures de sarcophage cryogénique. Je ne vois pas comment faire pour aller à l'aéroport Charles de Gaulle en trente minutes, avant que le guichet ne ferme. Pourtant je cours, à perdre haleine, dans les couloirs du métro parisien, et je me félicite de venir souvent dans la capitale pour m'abreuver à ses différents musées, je connais la route. Je prends la décision unique d'appeler Air France dès que je serai dans le RER, pour plaider ma cause.

Et je cours, je le répète, car j'ai des ailes et ce sac à dos chargé à ras bord ne me ralentit point !
Et finalement, me voilà sur le quai, encore un autre, courantdairisé comme il se doit, du RER B...étrangement désert. Normal, me direz-vous, la grève du personnel SNCF empêchant du coup l'interconnexion avec l'aéroport CDG en a dégoûté, débouté plus d'un.

Alors oui, je vais appeler Air France, mais pas pour plaider ma cause, mais pour implorer le saint des aviateurs, je ne connais pas son nom, mais je suis prêt à immoler cent vierges pour qu'il m'accorde ses faveurs. On ne me dira pas son nom, mais on me dira qu'en invoquant le dieu Cartebleue et moyennant une obole symbolique d'un bras et d'une jambe, ou de mille deux cent euros, je pourrais m'envoler vers des cieux plus cléments dans l'après-midi.

Expedia m'expédiera illico pronto, ne retrouvant bien entendu pas mon dossier, là-bas sur cette plate-forme marocaine ou tunisienne, là-bas où il fait chaud... mais leur accent ne me réchauffe pas, même s'il sent bon les vacances. Les miennes, au lieu de décoller, prennent le large. La poudre d'escampette, sans moi.
Le dieu MondialAssistance ne pourra répondre favorablement à ma requête, n'ouvrant son autel à offrandes que du lundi au vendredi, de 8 heures à 18 heures 30.

De dépit, frustré, abattu, j'appelle à l'aide. J'ai besoin d'un café-prune, un ballon de cognac, une pinte de vodka cul-sec, que sais-je encore ! Je suis sûr que j'apprendrais, ce soir au journal de vingt heures, de la belle bouche de Claire, que conformément à la loi des séries murphiennes, l'avion que j'aurais dû prendre s'est écrasé quelque part entre Paris et Washington DC. Vu d'ici je sais que ce n'est pas drôle, mais là je l'ai mauvaise. Vraiment. Alors j'appelle à l'aide, je balance toutes les balises Argos que j'ai en réserve, j'allume des feux, je tire mes derniers pigeons et je lance mes dernières cartouches, et là...

Dimitri, mon tavaritch islais, homme de bien et dieu de mes weekends balleressiens, répondra à mes plaintes et me tendra une main, et me voilà, à Paris qui est belle et bien réveillée par les grèves depuis à peu près cinq heures. Et je pense que nous allons la maintenir éveillée un petit moment, la capitale !

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