Tuesday 2 February 2010

L'insouhaitable #3


Alice
          Alice se réveille doucement. Une douce chaleur pique sa peau ; une brise légère fait danser le rideau devant la fenêtre. Elle tourne la tête vers la porte et s’aperçoit, un peu déçue, qu’elle est seule dans la pièce blanche. Elle s’appuie sur son coude et tente de se relever mais quelque chose l’en empêche. Elle tourne la tête en direction du cliquetis sur sa droite et découvre ébahie tout un appareillage complexe de tuyaux. Pourquoi est-elle sous perfusion ? Elle regarde stupéfaite les gouttes tomber à allure régulière dans la solution limpide. Alors qu’elle scrute le ciel à travers le ballon en plastique transparent, relié à son bras par un fin tuyau ondoyant comme un serpent, transparent lui aussi, elle se souvient. Il y a deux jours, elle a accouché, elle a donné naissance à son premier bébé, son enfant. Et les neuf mois d’attente ne comptent plus aujourd’hui, ni la souffrance des contractions, ni l’anxiété durant tous ces mois où les échographies étaient trop floues pour y voir distinctement son bébé, ni son bébé en siège. Elle se souvient que son mari était présent au début de l’accouchement, qu’on lui avait demandé de sortir, qu’il avait d’abord refusé, puis face à l’insistance du médecin, il avait accepté ; qu’il lui avait tenu la main, mais aujourd’hui même cela ne compte plus. Elle se souvient avoir accepté la péridurale, puis la césarienne, sans broncher, parce qu’elle voulait son bébé. Elle voulait qu’il arrête enfin de se cacher dans son ventre, qu’il se montre à elle, elle qui le portait, le choyait, lui parlait quand il dormait, le caressait à travers cette peau, cette chair qu’elle en venait parfois à détester, à vouloir déchirer pour enfin pouvoir étreindre son fils contre son cœur.
 
          Doucement, silencieusement, Alice pleure. Elle ne sait pas au juste pourquoi elle pleure, mais cela la libère de quelque chose car, à mesure que les larmes coulent le long de ses joues creusées et s'écrasent sur la blancheur de l’oreiller, sa poitrine s’affranchit de son oppression, ses jambes se relâchent et son cœur bat moins vite, plus régulièrement.
 
         Elle repose sa tête sur l’oreiller, sent la froideur du tissu imprégné de larmes. Le rideau diaphane danse toujours la danse du vent par la fenêtre ouverte. Le soleil n’est pas visible, caché par un pan de mur, mais elle s’imagine son éclat en le comparant à celui du ciel bleu, puis se demande si l’éclat du ciel bleu n’est pas plus brillant que celui du soleil. Elle ne se rappelle pas quand son fils est né, mais elle aimerait qu’il soit né aujourd’hui, par cette matinée si bleue. Avec maintes précautions, Alice se relève et s’assoie ; mais un instinct en elle l’avertit, trop tard. Une douleur lancinante traverse sa tête de part en part, lui vrille les tympans, résonne comme les cloches d’églises des dimanches de sa jeunesse, dans tout son corps. Elle sent dans son ventre comme une flamme lécher ses intestins, ses poumons, sa gorge. Le regard fixé sur le drap de coton, sur le creux et les plis que ce dernier forme entre ses jambes, elle lutte contre la douleur, si aiguë soit-elle, contracte ses muscles, serre les dents. Un spasme secoue son corps et elle vomit sur le drap, devant elle.
 
        Elle ne comprend pas ce qui se passe en elle, pourquoi son corps se rebelle ainsi. Les changements à l’intérieur de son corps se font plus nets, plus réels : son fils n’est plus dans son ventre ; et puis il y a autre chose, un changement plus profond. Elle ignore la raison pour laquelle elle pense soudain aux hiéroglyphes dans la pyramide de Gizeh, mais elle associe aussitôt, spontanément, les mystérieux hiéroglyphes à ce changement. Et son esprit remonte à la surface, comme un plongeur remontant des abysses recouvrent ses sens. Alice entend un son comme dans le lointain, sa tête pivote d’elle-même sur son axe. Dans le chambranle de la porte se tient une femme tout de blanc vêtue, une infirmière dont les lèvres bougent au ralenti, dont une veine, sur son cou, palpite doucement. Alice ne parvient pas à lire sur les lèvres qui sont trop loin ce murmure qui est trop bas. De son regard figé, comme si elle ne voyait pas ce qu’elle voyait, elle embrasse la scène : plusieurs infirmières, courant au ralenti, se précipitent vers elle. Puis, toujours au ralenti, Alice voit la pièce tomber délicatement sur le côté et rester doucement en équilibre, la scène défilant de manière plus irréelle encore. Elle sent la fatigue, une fatigue immense, comme si elle n’avait pas dormi depuis des siècles, inonder l’intérieur de son corps, éteindre le feu dans son ventre, engloutir ses sens. Puis, lentement comme tirant un rideau opaque à la fin d’une scène de théâtre, l’obscurité.
 
         Elle se réveille, de nouveau. Elle a la bouche pâteuse. Ses paupières sont lourdes, mais elle parvient à les lever suffisamment pour observer une infirmière, au sourire énigmatique, lui essuyer le visage. A son tour, Alice sent ses joues se plisser dans un douloureux sourire. L’infirmière lui éponge délicatement le front, son regard est tendre, elle aussi est une mère. Son corps repose dans une plaisante torpeur, comme si elle se laissait glisser au fil de l’eau. Elle a envie de répondre à cette gentillesse, à cette infirmière qui prend tant soin d’elle, mais quand les mots sortent de sa bouche, ce ne sont pas ceux qu’elle avait l’intention de prononcer : «Je souhaite que mon fils aille bien.» Alice sent les muscles de son visage se contracter sous la surprise, mais l’infirmière répond par un sourire plus grand encore, Alice croit même voir des larmes inonder ces immenses yeux bleus aussi immense que le ciel de tout à l’heure. Alice veut lui dire qu’elle est reconnaissante, qu’elle veut la serrer dans ses bras et la remercier du plus profond d’elle-même, mais de nouveau elle sombre dans le sommeil, le cliquetis de la perfusion tintinnabulant dans ses oreilles.
 

Quotes of the week / Citations de la semaine: Modern / Moderne


« Saisis l'instant, sachant que chaque jour de ton futur, c'est un jour qui s'en va. » (Mocharrafoddin Saadi)

« Le privilège des grands, c'est de voir les catastrophes d'une terrasse. » (Jean Giraudoux)

"I know not with what weapons World War III will be fought, but World War IV will be fought with sticks and stones." A. Einstein

« Le langage est tout simplement l’essence spirituelle de l’homme. » (Walter Benjamin)

« Je sens que je suis libre mais je sais que je ne le suis pas. (Cioran)

« Ouvre l'oeil et regarde, tu verras ton visage dans tous les visages. Tends l'oreille et écoute, tu entendras ta propre voix dans toutes les voix. » Khalil Gibran

"Seek and destroy" (Metallica)

« J'aime les hommes qui ont de l'avenir et les femmes qui ont un passé. » (Oscar Wilde)

« Les fonctionnaires sont un petit peu comme les livres d'une bibliothèque. Ce sont les plus hauts placés qui servent le moins... » (G. Clemenceau)

« La liberté ne consiste pas seulement à suivre sa propre volonté, mais aussi parfois à la fuir. » (Abe Kobo)

« Comment pouvez-vous identifier un doute avec certitude ? A son ombre ! L'ombre d'un doute, c'est bien connu. » (R. Devos)

« Je peux à peine comprendre l'importance donnée au mot recherche dans la peinture moderne. A mon avis, chercher ne signifie rien en peinture. Ce qui compte, c'est trouver. » Picasso.

« Etre moderne, c'est bricoler dans l'Incurable. » Cioran, Syllogismes de l'amertume.

« Il faut être absolument moderne. » A. Rimbaud, Les illuminations, "Adieu".

« Dans toutes les larmes s'attarde un espoir. » (Simone de Beauvoir)

"Que fait-on dans la rue, le plus souvent ? On rêve. C'est un des lieux les plus méditatifs de notre époque, c'est notre sanctuaire moderne, la Rue." Louis Ferdinand Céline

"Il est absurde d'avoir une règle rigoureuse sur ce qu'on doit lire ou pas. Plus de la moitié de la culture intellectuelle moderne dépend de ce qu'on ne devrait pas lire." (Oscar Wilde)

« Une âme délicate est gênée de savoir quelqu'un son obligé ; une âme grossière, de se savoir l'obligée de quelqu'un. » ( Nietzsche)

« S'il avait dépendu de moi de ne pas naître, je n'aurais certainement pas accepté l'existence à d'aussi dérisoires conditions. » (Dostoïevski)

Weekly game: aouw tou rivraÿte euh tekste


Frenglish! Let's re-write this text with a French "pronunciation". iou donte nide tout eundeurstennde évrisinngue. djeust dou hit ènnde goudleuque!
Tekste tou pronaounsse:
Humpty Dumpty sat on the wall, Humpty dumpty had a great big fall, All the kings horses, And all the kings men Couldn't put Humpty together again


Caro eumeti deumeti sate aune zeu ouaule, eumeti deumeti ade heu grite bigue fole, ole ze quingxe orssise, unde ole zeu quingxe mène coudene-te poute umeti touguézeur eu gaine !

Jeu de la semaine: raie écrit ture haie faux teudor taugraf


Z'aimez les fautes d'orthographe? Moi naussi. Allaure ont vas raie ékrirre un tekste ant feuzan dé fôte. sé parrti mont quiqui!

Quelle différence y-a-t-il entre un canari et un tuyau d'arrosage ? Aucune : ils ont tous les deux en plastique, sauf le canari...


Caro La più bella espressione libera è : "cocorico", senza canarino e senza tubo di annaffiamento, vero ?? Claro que si,e senza hérauri dé aurtographya !!!

Bino Quelle révérence lia-t-il en train un canne à riz est un thuya d'art aux sages? au clou : ils sont doux les vieux orgasmiques, sauf le granini...

Caro kailes dyphée rance ia tyle antres hin cas narrie aie hun tui ihauts da rausages ? Oquneu : yleçon toux lédoeuf an plasstik, sof leu ka nari...

L'insouhaitable #2

Olivier
           Le groupe se disperse au fur et à mesure des croisements, au fur et à mesure des immeubles ; chacun rentre chez soi pour ce midi. Par un quelconque fruit du hasard, Olivier habite plus loin que tout le monde, dans une rue que seul le montant des loyers isole; ainsi termine-t-il toujours le trajet seul. Mais il n’aime pas être seul, il n’a jamais aimé l’être, depuis tout petit. C’est pourquoi il sait s’entourer d’une bande de garçons. Il se fiche pas mal de savoir s’ils le craignent ou le respectent, l’important est qu’ils restent autour de lui. Et aujourd’hui Olivier est las d’achever son retour seul: il aimerait avoir un peu de compagnie pour la dernière ligne droite. Il regarde autour de lui, mais il sait bien que personne de son âge ne passe par ici, pour la simple raison que personne de son âge n’habite le quartier. Tout le monde est à la soupe.
           Il n’y a là que des vieux, des croulants tirant leur misérable vieillesse ridée et cabocharde et leur caddie bariolé à trois roues les jours de marché, ne semblant attendre qu’une chose : que leurs paupières fripées se ferment enfin – que ce soit dans la maladie ou dans le sommeil – comme ses grands-parents. Puis une pensée l’arrête : que ferait-il si un jour il devait se retrouver seul, sans parents, sans frère, sans amis ? Il réprime un frisson et secoue la tête vigoureusement. Il se remet en marche et, en son for intérieur, il se fait la promesse de ne jamais être seul. Immédiatement, il se rend à l’évidence qu’une telle promesse est impossible à tenir, il ne pourrait soumettre perpétuellement ses copains de classe à sa volonté. Il n’arrivait jamais à garder ses amis bien longtemps, aussi forçait-il le destin en forçant la main de ses compatriotes. Il se demande comment il doit faire pour se procurer un ami qui lui soit fidèle, un peu comme Achille et son pote.
               Alors, il lève les yeux au ciel bleu, qui est surprenant aujourd’hui, tout comme la chaleur presque estivale, tout comme l’éclipse de soleil qui se prolonge dans cette mer bleue et dont personne ne parlera aux informations; il ferme les paupières tout en continuant à marcher et souhaite ne jamais être seul dans le futur, quoi qu’il fasse et où qu’il soit. Et, à voix haute, comme un appel pour le monde entier, la parole suit sa pensée : «Je voudrais ne jamais être seul, quoi que je fasse et où que je sois.» Il rouvre les yeux à temps pour éviter de justesse de tomber dans le caniveau – manque se tordre la cheville et crache un juron bien senti, comme il les aime – et, tandis qu’il regarde la tâche ronde du ciel bleu s’estomper sur sa rétine et gêner un instant sa vue, il se demande si son frère est rentré de la caserne, il a tellement envie de lui parler.

Monday 1 February 2010

L'insouhaitable # 1

Thomas
 
        Quelques blancs oiseaux se noient dans la lumière du ciel bleu de midi, un peu comme s’ils n’étaient pas là, en fait. Le ciel brille tellement qu’on a l’impression qu’il éclipse l’éclat du soleil. Bizarre, tout ça. Bref.
 
         L’activité va bon train dans le centre de la ville. Les passants passent devant les devantures des magasins ; les livreurs livrent ; les badauds badinent assis sur les bancs usés ; les clochards nonchalants étendent leurs jambes sur le trottoir chauffé par les rayons du ciel ; la légère brise de mai effleure les toits d’ardoise ; les écoliers sur le chemin du déjeuner s’attardent en riant devant les magasins de jouets ou en bavant devant les boulangeries. La fin de l’année scolaire et le début de l’été approchent. L’effervescence générale semble atteindre la cime même du ciel tant elle est bleue. Thomas regarde ce bleu et se demande combien de pots de peinture il a fallu à Dieu pour peindre ce ciel aussi parfaitement, sans aucune trace. Bien sûr, Thomas ne se prend pas au sérieux, mais il aime à se souvenir de ces choses qu’il avait l’habitude de penser quand il était plus petit. Oui, plus petit. Car il n’aime pas qu’on lui rappelle qu’il est encore petit pour son âge. Une de ses grands-mères l’a même affublé d’un chétif qu’il n’a pas apprécié lorsqu’il a trouvé sa signification dans le dictionnaire. Mais sa mère lui répète sans cesse : «on est comme on est», ce qui lui parait une maigre consolation, compte tenu du fait que la plupart de ses camarades de classe sont plus grands que la moyenne. Bref.
 
           Thomas rentre chez lui en traînant le pas car, devant lui, traînant le pas encore plus, flemmarde un groupe d’élèves de sa classe, emmené par le grand, à la fois par sa taille – sa corpulence, ajouterait le prof de Français – et par son âge, Raquin. Olivier Raquin est la terreur des quatrièmes, et cela depuis deux années consécutives. Son groupe, sa phalange avait-il entendu dire un jour ce même prof de Français, se compose principalement de garçons qui se sont déjà fait rosser par le titan. Se faire castagner par Raquin, c’est être accepté sous sa coupe, à condition bien sûr de n’avoir rendu aucun coup. Thomas a déjà passé le test plusieurs fois et n’a jamais échoué à cause de ses bras trop courts, même s’il n’a jamais eu envie de faire partie de cette phalange terrible.
 
       Lui, il voudrait être un peu comme l’autre terreur des quatrièmes : Benjamin. Il ne connaît pas son nom de famille parce que ce dernier, aussi âgé que Raquin, n’est pas dans sa classe et parce que tout le monde autour de lui l’appelle Benji. Ce Benji a un style bien différent de celui de Raquin, le dernier joutant avec ses poings – ses pieds parfois – le premier avec des mots. Il a un talent incroyable pour faire rire les autres, pour tourner en dérision le plus redoutable de ses adversaires, même les géants de terminale. C’est celui qui prend les faibles sous son aile, et qui les laisse de côté lorsque l’orage est passé. Dans la cour de récréation, il y a toujours deux groupes dans les quatrièmes : celui de Raquin et sa phalange de mauvais graines et celui de Benji et ses joyeux drilles où se mêlent assez souvent des filles de troisième, parfois de seconde.
 
          Entre ces deux alliances et des groupuscules de filles aussi hétéroclites qu’improbables gravitent plusieurs autres groupes sans meneurs et sans autre particularité que de n’en pas avoir. Thomas, à l’instar d’une poignée d’autres solitaires, n’appartient à aucun groupe, il n’est l’ami de personne. Il ne saurait dire pourquoi il ne se sent pas comme foncièrement solitaire ; toujours est-il qu’il est seul. Ne semble pas s’en porter plus mal.
 
          Thomas ralentit, car la sinistre engeance devant lui ralentit aux abords d’un magasin de vidéos. Raquin pointe du doigt quelque chose dans le bas de la vitrine ; aussitôt ses acolytes s’esclaffent ; certains ricanent seulement, l’air gêné. Le groupe se remet en marche, Thomas en fait de même. Il passe à son tour devant la vitrine et regarde la jaquette de la vidéo : une femme nue, allongée sur le ventre sur un lit de soie noire, ses cheveux blonds cachent ses épaules ; deux visages d’hommes se tiennent derrière elle, l’air grave ; le titre au-dessus: De grandes espérances. Pas de quoi fouetter un chat. Encore une bonne blague pas drôle à la Raquin. Il avance. Est-ce le titre ou bien la femme qui les a fait rire ? Peut-être avaient-ils l’espoir de voir la femme se lever, nue, et se pavaner en s’exhibant devant leurs yeux effarés ? La grande espérance de concrétiser la chose dont tout le monde parle, enfin ? Le prof de Français l’avait pourtant prévenu : « Non, Monsieur Raquin, l’ambition n’est pas une marque de préservatif et l’un comme l’autre vous font défaut. »
 
          Quand il y pense, il se dit que lui a une grande ambition, une grande espérance. Faire rire. Il aimerait pouvoir faire rire les gens et en faire son métier, et les gens en retour l’aimeraient et ils formeraient un groupe, une phalange énorme dans laquelle tout le monde se sentirait à l’aise et dans laquelle le seul gage d’entrée ne serait ni un coup de poing sur le nez ni une vanne, mais un sourire. Thomas sait pourtant qu’il n’est pas à plaindre, comme certains que Raquin tape juste pour le plaisir, mais aujourd’hui, marchant dans cette rue animée du centre-ville, entouré de badauds qui ragotent, de passants qui le bousculent pour la plupart, et de clochards indolents, avec ce ciel peint si bleu loin par-dessus les toits baignés de cette lumière de mai, il souhaite faire rire avec chacun de ses mots, pour qu’enfin les choses changent dans sa vie. Et à voix basse, comme pour lui-même, la parole suit sa pensée : «Je voudrais bien, moi aussi, faire rire à chaque fois que j’ouvre la bouche.» Il n’est pas bête non plus, la vie lui a appris à se méfier des rêves comme de la peste.
 
          À présent, il ne suit plus l’effroyable cortège car il a bifurqué, il y quelques instants, dans une rue perpendiculaire, sa rue. Dans une poignée de minutes, il sera chez lui, peut-être même dans la cuisine en train de déjeuner, racontant à sa mère les détails de la matinée.
 

Sunday 31 January 2010

Tuesday 26 January 2010

Une seule balle en poche

Je tiens à souligner au lecteur potentiellement attentif, et surtout soupçonneux, que cette nouvelle fut écrite dans ma prime adolescence, retrouvée (la nouvelle, pas l'adolescence) il y a fort peu sous un métaphorique tas de poussière. Excusez donc toute erreur de style, de syntaxe et de goût que votre œil sagace aura su déceler. Sachez également que le temps n'y a rien fait: je n'ai su m'en débarrasser.




Une seule balle en poche


        « Qu’est-ce que signifie cette balle en argent dans votre vitrine, mon cher ? Est-ce un cadeau de votre ex-épouse ?
      _Je n’aime pas votre sens de l’humour, Andrew. Cette balle n’est pas un cadeau, loin de là. En fait, cette balle en argent a un but bien précis, et une histoire. Si vous pouvez vous abstenir de plaisanter pendant quelques minutes, je veux bien vous la raconter.
      _Mais faîtes donc, mon cher. Nos collègues n’étant pas arrivés, nous avons bien un peu à partager de cette intimité formelle qui lie les hommes d’honneur.
      _Décidément, il n’y a rien à vous dire qui ne soit sujet à débat. Bref, voici mon histoire. Alors que j’étais jeune recrue dans l’armée de terre, il y avait un sergent-chef du nom de Smith. Et cet homme ne faisait rien d’autre que boire et tirer au pistolet. Toute la journée il demandait du whisky au messe afin d’y étancher une soif devenue légendaire au sein de notre section. Pareillement, son habileté au tir retenait la même attention. Plusieurs fois décoré pour son adresse et son efficacité sur les champs de batailles, il faisait alors partie des meilleurs tireurs au monde. Et bien que cet homme soit un alcoolique invétéré, il ne ratait jamais sa cible, jamais. Où qu’elle soit, qu’elle soit mobile ou non, loin ou proche. Le sergent-chef Smith possédait un don. Tous les soirs nous allions faire une patrouille de reconnaissance, puis nous montions un campement pour la nuit. Les tours de garde se faisaient par rotation, deux hommes à chaque fois. Andrew, cessez de faire le pitre avec cet accoudoir, il ne vous a rien fait. Et une nuit, je reçus cette balle des mains de Smith. Voilà.
       _C’est tout ? Et moi qui croyais que vous vous étiez battus dans un duel à mort et que vous lui aviez arraché cette balle du cœur. Je suis profondément déçu par votre conduite veule et lâche, mon cher.
      _Il y a beaucoup de vrai dans ce que vous dites, Andrew, et c’est fort rare ; mais comme vous semblez intéressé, laissez-moi continuer, s’il vous plaît.
       _Il ne me plait point ! Je croyais que vous aviez fini !
      _Je voulais simplement vérifier que vous suiviez attentivement mon récit, car vous manifestiez plus d’animosité envers cet accoudoir qui n’a rien demandé à personne mais qui pourtant reçoit là un châtiment à peine concevable.
      _Ce que je fais à cet accoudoir ne concerne que la maîtresse de maison qui en fit un usage tout autre que celui dont il fait l’objet à présent, je vous l’accorde. Trêve de bavardages, mon cher, et continuez, vous avez excité ma curiosité.
     _Une nuit nous avons été attaqués par un groupe d’autochtones fort peu organisé qui, en nous encerclant, se tiraient dessus. L’offensive fut vite réduite à néant. Pour fêter cela Smith sortit quatre bouteilles d’un vieux whisky qu’il avait échangé contre quatre livres…disons...très féminins, qu’il avait confisqués à un appelé. Personne n’osait boire le précieux breuvage par crainte de punition, d’une autre attaque surprise. Mais bien vite nos doutes furent dissipés par la bonne ambiance que Smith voulut instaurer. Alors commença la plus gigantesque beuverie à laquelle j’ai participé. Plus tard, les quatre bouteilles vides, nous avons discuté, chacun à notre tour, de nos vis respectives, ce que nous faisions, qui étaient nos amis, etc. Nous allions arriver au tour de Smith, le plus attendu de tous, lorsque la deuxième salve d’attaque arriva. Dans notre insouciance embuée de whisky, nous ne pensions plus aux autochtones que nous étions censés recenser et éventuellement éliminer. Bien différente de la première, cette attaque était organisée et menée de main de maître par le seigneur de la région, dont la tête était mise à prix par notre gouvernement. Mais bien loin de nous l’idée de vouloir ramener ce berbère vociférant, il nous importait plus de nous en sortir vivants. Mais pas Smith. Lui voulait à tout prix capturer cet individu, ce barbare qui hurlait à plein poumon, afin de toucher la prime, sûrement pour acheter du whisky. Ce berbère valait donc son pesant de whisky. Imaginez, Andrew. Dans une steppe quasi-désertique, cinquante berbères que nous n’avions pas vu arriver, fondant sur nous à la vitesse de l’éclair, braillant, hurlant, tirant, vociférant tels des chiens enragés. Un de mes compagnons fut tué sur le coup, son crâne ne résista pas à la balle qui vint s’y loger. Mais plus prompt à réagir que nous tous, Smith avait déjà dégainé et avait causé de lourdes parmi les attaquants. Nous avons finalement repoussé les assauts des berbères qui se dispersèrent comme des rats chassés à coups de balai. Mais le coup de balai c’est Smith qui l’avait passé. Il avait même réussi à blesser le chef des barbares, qui fut bâillonné et ligoté solidement. Nous avons d’ailleurs vite plié bagage, sinon les berbères seraient revenus le chercher. La nuit fut longue. Smith, notre sauveur, nous inquiétait beaucoup : il demandait à s’arrêter souvent, comme s’il était essoufflé, et ce malgré la menace qui planait au-dessus de nos têtes. Je fus le premier à apercevoir l’auréole de sang près de son bas-ventre. Smith s’écroula après deux heures de marche, trempé de sueur. Tout le monde paniquait, certains se demandaient s’il ne valait pas mieux libérer le berbère, d’autres se tenaient la tête entre les mains, comme si la fin du monde venait d’être sonnée. Mais Smith se releva tant bien que mal et ordonna de tuer le prisonnier et de lui trancher la tête. Tout serait plus facile ensuite. Malgré une peur palpable ce fut fait en quelques instants. Et moi qui voulais donner une sépulture à ce malheureux ! Smith m’en aurait voulu si je lui avais dit cela. Mais rien ne fut plus facile que de lui trancher la tête. Smith retomba à terre et ordonna à tous les soldats moi excepté de retourner au camp et de revenir avec des secours. Quelques regards incrédules se tournèrent vers moi, mais je n’en savais pas plus qu’eux. Pourquoi croyez-vous qu’il m’ait choisi plutôt qu’un autre ?
      _Je ne sais, mon cher…peut-être avait-il perçu quelque chose de bon et de réconfortant en vous ? Mon Dieu que l’on est aveugle et fou sur son lit de mort !
      _Je n’en attendais pas moins de vous, Andrew. Toujours est-il que nous sommes restés seuls dans cette nuit désertique, avec ce corps décapité à nos pieds. Nous sommes restés longtemps sans parler. Je n’osais pas lui adresser la parole. Je redoutais la vengeance des berbères. Mais il engagea la conversation, brusquement, sans ménagement. Mais c’est un peu comme si ce n’était pas à moi qu’il parlait. Il disait, simplement. Il dit alors avoir été infecté par une femme de joie d’un bas quartier, qui venait souvent au camp vendre ses légumes et des fruits frais. Il ne savait pas au juste quelle était sa maladie mais il souffrait le martyr, depuis plusieurs semaines. Il s’arrêta un moment, me regarda fixement et me dit qu’il avait renvoyé les soldats non pour l’aide qu’ils étaient censés ramener, mais pour que nous soyons seuls.
       _Comme c’est touchant ! IL vous aimait donc et voulait partager cette maladie vénérienne avec vous ! Quelle belle preuve d’amour !
       _Il voulait mourir dignement, Andrew, et pas bêtement.
      _Mais c’est pourtant ce qui s’est passé ! Cet homme, à jouer avec le feu, s’est brûlé. Mais continuez donc, cher ami.
      _Oui. Smith voyait bien ma mine déconfite, et il sortit cette balle de sa poche, et malgré les années elle a conservé ce même éclat qui m’avait alors frappé. Il me raconta qu’il l’avait fondue lui-même chez lui en Irlande. Il me dit aussi qu’il avait trouvé d’où venait le si bon goût du whisky. Il me dit que le whisky était l’urine de la terre, c’est pour cela qu’il était aussi bon. Mais comme c’était un secret, je devais jurer de ne rien révéler à personne. Allez comprendre…l’urine de la terre. Toujours est-il que cette balle semblait avoir le pouvoir d’un whisky quinze ou vingt ans d’âge. Il me la glissa dans la main et me susurra de lui épargner une mort honteuse devant ses soldats et supérieurs. Ensuite il s’étendit sur le sable, inclina la tête et ferma les yeux. Je en savais que faire. Auriez-vous pu faire une chose pareille ?
_Moi ? Mon Dieu non ! C’est totalement absurde.
_Mais pas pour lui, ni pour moi maintenant d’ailleurs. Il avait un sens exacerbé de l’honneur, aussi il ne voulait rien qui entachât sa réputation, même s’il semblait considérer n’avoir rien fait de mal avec cette femme. Ce furent des moments très pénibles pour moi. Je tremblais de peur.
_Mais il était mort depuis longtemps, n’est-ce pas ?
_Comment le saviez-vous ?
_Un homme tel que lui, modelé par l’honneur, ne se couche pas sur le sable et ne ferme pas les yeux devant la mort. Au contraire, il l’affronte sans sourciller et lui fait un pied de nez au dernier moment. C’est vrai qu’il était courageux, en fin de compte.
_J’ai longtemps conservé cette balle sur moi, croyant qu’elle m’apporterait courage et honneur. Mais vous aviez raison, Andrew, lorsque vous disiez que j’étais lâche et veule. Je n’ai même pas réussi à respecter les dernières volontés d’un mourant.
_Tel est le destin, mon ami, capricieux et débile. Je ne pense pas qu’il vous en veuille vraiment là où il est, où qu’il soit d’ailleurs, si c’est ce que vous voulez savoir.
_Vous croyez ?
_Oui. Mais nos collègues arrivent. Rangez cette solennelle balle dans sa vitrine et ne lui trouvez aucun écrin de chair et de sang. Et puis allez vous laver le visage, il serait impoli de recevoir quiconque avec vos joues couvertes de larmes. Je comprends ces larmes à présent, pas les autres. Il vous faudrait raconter cette triste histoire une seconde fois pour qu’ils comprennent, si tant est qu’ils veuillent bien vous comprendre. Mais étant le premier des sceptiques, ils n’auraient aucun mal à reconnaître l’erreur que j’ai moi-même commise. Veuillez pardonner, cher ami, si je n’ai pu sentir ce que vous vouliez me faire comprendre dès le début. Je suis misérable et plein de faux-semblants. Ils arrivent, je vais de ce pas les accueillir. Peut-être aurons-nous plus tard l’occasion de reparler de cette balle.
_Quelle balle, messieurs ? »

Thursday 21 January 2010

The Time Traveller - pour ceux qui l'auraient loupé lors de son passage au Cercle des Associés

« Wolfgang Amadeus Mozart?
_ Ya?
_ Ich bin französisch und mein Name ist Jacques Trusquin.
_ Ya?
_ Und...äh...
_ Was wünschen Sie? »


Ici, nous allons imaginer que l'entretien qui va suivre se déroule en allemand, avec un léger accent bavarois.


« Je sais que vous n'allez pas me croire, mais je viens du futur. Nous avons trouvé le moyen de nous déplacer entre les dimensions spatio-temporelles.
_ Oui.
_ Vous imaginez? Du futur!
_ C'est bon, je ne suis pas sourd. Vous venez pour quoi au juste, je suis un peu pressé. »


Jacques Trusquin a la mine déconfite. Une fois n'est pas coutume, les gens ne sont pas impressionnés par son entrée en matière. Il n'arrête pas de la changer depuis que Léonard lui a éclaté de rire au nez. Léonard quoi! Grosse déception. Bref. Il recommencera, une fois n'est pas coutume, avec le prochain. car Jacques Trusquin, en plus de ses grandes qualités de linguiste et de sa mémoire éidétique, est patient.


« Je suis envoyé du futur pour délivrer des messages importants à certaines personnes influentes dans notre monde. Je suis donc venu vous dire que pratiquement tous les chefs-d'œuvres que vous avez écrit ou allez écrire – on est en combien là, exactement?
_ Nous venons de fêter la nouvelle année 1791.
_ Ah...je...vous...bref. Euh...humhum. Profitez-en bien! Il vous reste une grande œuvre à faire, si ce n'est LA plus grande.
_ Je sais.
_ Ah bon. On va gagner du temps comme ça.
_ Vous dîtes que vous venez du futur, c'est ça?
_ Oui, c'est ça! Alors en fait -
_ Et je suis très connu? »


Purée! Tous les mêmes! Alors voilà: le gouvernement français prend le pari sur vingt ans – vingt ans – et investit des sommes pharaoniques dans le plus grand secret – des milliards d'euros – pour développer la théorie des supercordes et la mettre en application dans un puits gravitationnel multi-complexe, le tout bombardé avec force canon à électrons et antigravité, pour emprunter un trou de ver de Lorentz, et ce en faisant le plus grand pied de nez au deuxième principe de thermodynamique, et tout ce qu'on trouve à dire ou à savoir c'est « est-ce que je vais être connu? » [W.A. Mozart, 1791], « est-ce que je vais enfin mettre la main sur Spitaménès » [Alexandre le grand, -328] ou « est-ce que je vais gagner le prix Nobel de truc? » [H.A. Lorentz, 1901], « quand est-ce que je vais mourir? » [e.g. tant la liste est longue, George Washington, 1789] ou encore « est-ce que je vais enfin me marier? » [Richard Cœur de lion, 1190] et patati et patata. Ré-vol-tant. Bref. Pas de mal à lui concéder ça, tout du moins.


« Oui, pour être connu, vous allez l'être, beaucoup plus que maintenant.
_ Bonne chose, ça.
_ Donc vos œuvres seront dénaturées par la main de l'homme qui les utilisera pour des publicités pour des shampooings, des pâtes ou des voitures, et vous trouvez ça bien?
_ Hein?
_ Imaginez que vous voulez acheter un carrosse. Celui qui veut en faire la promotion, pour attirer des acheteurs, vous présente le modèle avec votre musique.
_ C'est bon, ça! Si le carrosse est beau...
_ Mouais. À vrai dire, je ne sais pas si je suis vraiment surpris par votre réaction.
_ En même temps, vous me disiez que vous aviez des messages importants à délivrer. Je ne trouve pas que cela justifie un voyage dans le temps. Vous vous attendiez à quoi? À ce que j'arrête de composer?
_ Bonne question. Je ne sais pas. Je ne sais pas pourquoi je délivre ces messages-là. Je respecte le protocole en cas d'extrême urgence, voilà tout. En plus, ça me fait passer le temps sans changer la concaténation des événements.
_ Je vous demande pardon?
_ Le cours des choses, si vous préférez. La marche « naturelle » de l'Histoire. Disons que l'histoire suit un chemin, comme une rivière suit son lit. Vous détournez le lit mais l'histoire coule toujours. C'est simple en théorie. D'ailleurs, la théorie est toujours simple, juste avant de rencontrer la pratique. Disons que ça a capoté à partir du Premier Changement ordonné par la Mission pour le Rétablissement de la Paix et de la Démocratie pour les Peuples. Ma mission était d'empêcher l'assassinat de François Ferdinand, archiduc d'Autriche.
_ Et vous avez échoué?
_ Ben non, le problème est que j'ai réussi! D'après mes calculs et grâce à l'aide de Léonard de Vinci, j'ai pu conclure à l'éradication de mon présent – de votre futur, en gros. J'espère que nous nous sommes trompés.
_ C'est gênant.
_ Le pire, c'est que nous sommes plusieurs sur la ligne. J'ai rencontré un type, le gros malin, qui m'a enguirlandé comme du poisson pourri parce que j'allais fausser toutes les données du flux temporel.
_ Son nom?
_ Merlin. Il m'a même dit qu'il y avait beaucoup de monde ces temps-ci qui s'amusaient à aller et venir.
_ Mais comment cela est-il possible?
_ C'est très compliqué à expliquer et sans vouloir vous froisser, même Léonard n'y a rien compris. Je vous laisse imaginer la galère avec Galilée. Bref. Une histoire de thermodynamique et de MC². AH! Si seulement je pouvais communiquer avec la base! Pffffff. Tout ça pour se dire que le multivers n'existe pas. C'est vraiment pas de bol. On planche là-dessus pendant des plombes, on spécule, on schématise, on prophétise et qui se retrouve le bec dans l'eau entre les dimensions? C'est Bibi! Non mais ya de quoi devenir chèvre! Oh et puis vous, là, retournez sonner vos sonates au clair de lune. Ah non, merde, c'est Debussy ça.
_ On se calme, jeune homme. On se calme. Vous voulez une verveine? Ça va vous apaiser. Constanze! Une verveine pour le monsieur du futur! »


Quatre ans, selon ses calculs. Quatre ans à bourlinguer entre ici et là et là-bas et jadis et naguère. Comment garder son calme? Il ne trouvait pas de solution à son problème, et à chaque fois qu'il essayait de se mettre en quête de quelqu'un qui pourrait peut-être le sortir du pétrin, il devait repartir. Mozart le regardait, l'œil malicieux. Pas un mauvais bougre. La plupart du temps, les hommes ne ressemblaient pas à leurs représentations graphiques, ou même à l'image qu'on se faisait d'eux. Dans certains cas, si.


« Vous êtes bien aimable, monsieur Mozart. Vous savez, je suis sous pression. Je n'arrive pas rentrer, je ne sais même pas si je peux rentrer...il ne me reste qu'à attendre à chaque fois que cette stupide montre sonne pour m'annoncer mon départ vers une autre dimension, un autre espace-temps.
_ Et ça arrive souvent?
_ M'en parlez pas! Tous les deux jours environ, parfois plus. L'avantage, c'est que je sais quand j'irai la prochaine fois. Quand et où.
_ Et où cela se trouve-t-il?
_ La France! Je rentre au bercail, même si c'est en 1880. C'est pas comme si y'avait pas de monde à voir, hein? L'avant-dernier voyage, je me suis retrouvé en Mésopotamie en moins 4000 et des brouettes avant Jésus. Autant dire que c'était pas la fête au village. Le truc, c'est que tous les paradoxes temporels tombent comme des mouches et que je n'ai pas encore eu la chance de divulguer quoi que ce soit à mon gouvernement! La date la plus avancée à laquelle je suis retourné est 1982.
_ Et ça n'avait pas commencé?
_ Loin de là. Le projet MRPDP a vu le jour le 8 mai 2048. Mais même en 1982 je n'aurai rien pu dire, j'étais coincé en Ouzbékistan. Pas étonnant que j'en aie perdu mon flegme et mon français. Bon, ben je vous laisse. Je dois essayer d'aller voir Victor Hugo pour lui dire que la prison qui portait son nom a fermé avant que je parte.
_ J'hésite à vous dire bon voyage.
_ Ça ne mange pas de pain. Bon courage à vous, pour la dernière.
_ Vous n'auriez pas l'occasion par hasard de me donner un petit coup de main? Mmh? Sans forcer le destin, non, rien de tout cela. Juste les premières notes?
_ Tous les mêmes. Une fois que vous vous mettez à réfléchir, personne ne peut vous arrêter. Bon. Je vais pas faire grand mal. Ça ressemble à un truc du genre: « Taaaaa dadaaaaaaa, tadadadadaaadaaaaaaa »
_ En fait, oubliez. C'est mieux comme ça, non? Je ne prendrai aucun plaisir à ne pas trouver tout seul, n'est-ce pas?
_ Mouais. Bref. Vous imaginez sans peine que nous n'avons jamais eu cette conversation, je n'ai jamais existé. Le futur ne doit pas entendre parler de moiBIIIIIIP.
_ Vous n'êtes déjà plus là. Monsieur Trusquin? Monsieur Trusquin? »

Sunday 17 January 2010

Citations de la semaine: Montagne / Quotes of the week: Mountain


« A mes montagnes, reconnaissant, infiniment, pour le bien-être intérieur que ma jeunesse à retiré de leur sévère école. » (Walter Bonatti)


"Fermée comme un volet de buis, Une extrême chance compacte, Est notre chaîne de montagnes, notre comprimante splendeur." (René Char)




"Climb if you will but remember that courage and strength are nought without prudence, and that a momentary negligence may destroy the happiness of a lifetime. Do nothing in haste; look well to each step; and from the beginning think what may be at the end." Edward Whymper




« Qui veut gravir une montagne commence par le bas. » (proverbe chinois)


« Après avoir essuyé cette avalanche de questions, je finis par déchausser, la piste étant par trop abrupte ! » (proverbe dominical et carolingien !)




« Les montagnes, toujours, on fait la guerre aux plaines » (Victor Hugo)


« Le seul zen que tu trouves au sommet des montagnes est celui que tu y portes. » R. M. Pirsig. Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes.


"Quand tu es arrivé au sommet de la montagne, continue de grimper". Proverbe chinois




« Un homme sans défauts est une montagne sans crevasses. Il ne m'intéresse pas. » (René Char)




« Si la vie était éternelle nous n'aurions plus de raison de vivre. » (Simon, un grand philosophe de ma descendance)


« Dieu a tout fait à partir de rien. Mais le rien perce. » Paul Valery


"You don’t have to be a fantastic hero to do certain things – to compete. You can be just an ordinary chap, sufficiently motivated." Edmund Hillary

thirty thousand people

The day was torn and grim birds yet began to sing as if they knew nothing’s eternal and old gives way to new that man, one day, will fall t...