Partie de rien et revenue de tout,
Sa peau gorgée de rivière, au goût sucré de soleil,
La voici en plein essor de faucon pèlerin –
Les erres rompues par les vents –
Parce que rien n'est perdu au ressouvenir des digues.
Parce qu'au soir de lassitude la gorge est prise –
Les mains et les lèvres restent lestes cependant,
Empreintes de ce que nous autres appelons sobrement « nuit ».
Elle est apparue comme un météore sur l'horizon
A la tête de cents et mille chevaux de brume –
Recouvrant d'une mer de crinières la vaste plaine –
La main tendue au devant d'elle, paume ouverte.
L'iris grêlé des comètes et des raisins d'aube.
Elle n'a jamais su qu'écarter le malheur,
Elle qui est comme le freux frôlant le champ de blé,
Isolée ainsi la pierre oubliée sur le muret.
Il n'y a bien que le temps pour avancer dans ces circonstances.
Eratosthène lui tend la main, le seul
Des trente à ne pas connaître sa langue,
Sait qu'elle prendra place au centre des armillaires
Et qu'elle le fera succomber de cécité.
Ce qu'il voit dans le diaphane de ses paupières,
C'est le mystère premier résolu, bien qu'encore crypté,
Comme engravé à fleur de peau sur cette sombre persane.
En apposant ses pas mesurés sur le sable fin du désert des enfances –
Elle qui fut née hors l'écoumène –
Le bématiste lui-même ne peut se résoudre à le croire.
Un an à arpenter la terre pour en percer
Son plus intime secret n'est rien à la couleur de ses yeux.
Tout à révéler le jour d'une fête obscure et païenne –
Dansant autour d'un feu de pommes de pin et de bois mort,
Les plantes des pieds nus et cornés foulant
Cendres et sable et salive et sueur
En décadence, arythmique dissonances de tambour ivres
Et de battements de mains sourds et sonores.
Eratosthène trouve toujours ce qu'il recherche, dit-on,
Fut-ce au fond d'une tasse de thé divinatoire.
Car il ne reste jamais les deux pieds au même endroit.
Surtout depuis qu'il tient la main de celle qui marche.
Aucun des deux n'en est à son galop d'essai.
Chacun un jour donné eut son crapahut enneigé,
Son envie de voir plus loin que le dernier pas,
D'éperonner une énième vague.
Son envie de rebrousser chemin parmi les dunes –
Et la volonté de ne s'arrêter que pour contempler.
Le vieil homme la regarde et voit ce qu'il n'a jamais que deviné.
Elle le regarde et voit au travers ce que l'on ne recherche pas.
C'est une nouvelle fois très beau, très optimiste et très profond.
ReplyDeleteJe vais finir par croire que la poésie te sied à merveille et que de ces mots que tu affectionnes tant, tu sais en faire la dentelle de la vie.
Oh la la, c'est toujours un plaisir de lire tes poèmes ! Les mots sont subtilement choisis, et quand tu les assembles c'est un maelström d'émotions qui nous emporte !
ReplyDeleteMerci merci les amies!
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