Monday, 5 July 2010

Histoire dont vous êtes les héros #10 - (en)fin!


...au gré du hasard. Ce dont vous êtes certain :

Le boucher slave, s'il n'a pas reçu votre projectile, doit être passablement sur les nerfs. Il a beau avoir reçu un tamashigiri dans les côtes, avoir un roquet poinçonné sur un mollet et s'être mangé une pelle en pleine poire, vous pensez qu'il a dû en voir d'autres. Ergo, il sera d'une humeur massacrante.

Ce dont vous n'êtes pas certain (et c'est peu dire) :

Où est partie cette satanée balle?

Tout peut s'expliquer en un centième de seconde – l'équivalent du trajet de la balle :

Imaginez donc cette balle à cœur de plomb chemisée de cuivre (tout cela, vous le savez de source sûre, n'est pas du tout éco-responsable) 9mm Parabellum (« Si vis pacem, para bellum » Vegetius, Epitoma Rei Militaris : si tu veux la paix, prépare la guerre) aka FMJ ou Full Metal Jacket, violemment amorcée par le percuteur, éjectée par le canon de l'arme, en l'absence de nuage de poudre (depuis les années 1890 il n'y en a plus – oust la sempiternelle poudre noire), lancée à une vitesse approximative de 350 m/s: donc Emir, situé à environ 3 mètres 95, allez, disons 4 mètres, devrait recevoir la balle, s'il la reçoit, dans 0,011428571428571428571428571428571 seconde (vous pouvez donc voir que vous aviez raison depuis le début). Ceci étant dit, ceci étant fait, vous voilà embarqué dans un récit qui dure 0,011428571428571428571428571428571 seconde.

La balle est sur son trajet, sa trajectoire est linéaire (l'impact de la distance est ici négligeable), droite, dans l'alignement imprimé par le canon. Elle a une légère tendance à vriller sur elle-même, mais là encore la distance fait que ce mouvement est négligeable. Vous pouvez d'ores et déjà éliminer la direction de l'épaule, l'angle du canon ne la permet pas.

Pendant le temps où la main du destin dirige votre balle, vous voyez le futur se dessiner au fin fond de votre esprit, aussi distinctement et aussi véritablement que Cassandre a dû voir le sien. Vous voyez Elena dans vos bras après une nuit d'amour enfiévré ; vous vous voyez affalé sur un transat sur une île paradisiaque, au beau milieu de nulle part, un hydravion en arrière-plan amarré à un ponton dans une crique bleu turquoise, à siroter un cocktail tout en écrivant une carte postale à Mme Froitemont accompagnée d'un chèque pour les croquettes au caviar de Polly ; vous vous voyez dans un appartement sur la cinquième avenue à New-York, votre Walther PPK exposé, bien en vue, dans une vitrine en verre, à donner une réception où vous ne reconnaissez pas encore tout le gratin, mais il y a bien quelques stars hollywoodiennes comme...comme...Woody Allen ou Gianna Michaels (NDLR n'allez pas voir, sauf si vous êtes majeur et vacciné – un vieux reste du célibat forcé de notre héros), ou encore Nicole Scherzinger, même si c'est une chanteuse (là ce n'est pas pareil, c'est une vieille habitude, NDLR) ; vous vous voyez main dans la main avec Elena dans les rues enneigées de la capitale moscovite – la balle a parcouru la moitié de la distance (soit deux mètres environ et 0,005714285714285714285714285714 seconde) et il est possible qu'elle aille se ficher dans le chambranle de la porte – vous vous voyez allongé sur le sol, dans une mare de sang, ce salaud d'Emir vous dominant de toute sa superbe, les mains maculées des sangs d'Elena, du vôtre, de Mme Froitemont. Dans un de ses poings hoquète le corps agonisant de Polly, ses poils collés en dread locks affreux ; vous vous voyez dans le meilleur des cas luttant contre le colosse, assénant son visage de violents coups de poings et lui ne bougeant pas d'un pouce, souriant même, une lèvre fendue, et vous envoyant valser sur votre table de salon, sur le mur de votre chambre, votre dos craquant sinistrement sur la table de chevet – la balle est pratiquement arrivée à destination – il ne fait plus aucun doute que seul l'un de ces scénarios est le bon : reste à savoir lequel – et en un instant aussi court qu'une poignée de microseconde, vous voyez cette balle venir de plein fouet se ficher 
 

1 comment:

  1. Celle qui déteste les trous de balle6 July 2010 at 19:16

    Mon Dieu, mais tu es possédé!!!
    Si tu avais été, de quelques longues années, plus âgé encore, et doté par ailleurs de ces rides qui font capituler le vif et l'insouciant, tu aurais pu faire carrière, non pas en tant qu'objecteur de conscience, terme fort malheureusement suranné s'il en est toujours, mais bien plutôt aux côtés des troupes miliciennes ou des "paras" les plus déjantés... c'est dire !
    Ce fut en tout cas un beau morceau de bravoure.

    ReplyDelete

Avis sur la chose en question
Feedback on the thing in question

Silly little details

  You said it was the way I looked at you played with your fingertips drowned in your eyes starving your skin you felt happiness again your ...