De loin, on croirait qu'il n'y a rien,
juste une ligne d'horizon que rien ne coupe.
Tout est à sa place, de part et d'autre
de cette frontière sans fin.
Il faut se figurer une bande nuageuse
comme ramassée et figurant un royaume.
Ce matin-là, il y a des poignards de soleil
qui endaguent la plaine.
Si l'on se rapproche, l'on voit un vallon,
creusé par les âges.
Si l'on voulait, on pourrait s'arrêter là,
nous aurions encore le regard de l'horizon,
encore des impressions sur la rétine.
On ne verrait qu'un sycomore esseulé en son centre,
et rien d'autre, à bien y regarder.
Si on le voulait, on se tiendrait là,
et il y aurait peut-être du vent.
Si l'on se rapproche encore,
sous ce sycomore,
on pourrait croire qu'il n'y a rien.
La lumière ne vient pas jusque là.
Mais il y a un homme, sobrement vêtu,
assis.
Il tient ce qui semble être une houlette,
et son coude droit repose sur son genou.
Il a l'air tranquille, pensif.
Il est seul.
Si l'on était intrigué par cet homme,
ou par sa présence en ce lieu,
on se rapprocherait.
L'on apercevrait alors un visage buriné
par le vent, le grès, le songe.
On se méprendrait sur son apparente nonchalance.
L'on jetterait un œil alentours,
comme inspectant le silence.
Comme jaugeant la sérénité de l'endroit,
sa justification.
On entendrait, distinctement,
le bruissement des feuilles du sycomore.
En levant les yeux, on pourrait se demander
qui est le plus clairvoyant, de l'arbre ou de l'homme.
L'on pourrait, au fond de ce vallon,
s'asseoir pour tenir compagnie
à cet homme qui a l'air de n'en pas vouloir,
à cet arbre qui n'y prête aucune attention.
Ainsi l'on se rapprocherait,
l'on pourrait alors plonger notre regard
dans celui bleu comme l'invisible ciel
de cet homme sans histoire,
sous le sycomore vieux comme le monde,
et l'un et l'autre en savent long
mais l'arbre plus encore,
cet arbre séculaire qui est tout et rien
et que l'on ne voit pas, au fond de ce vallon,
entre creux et coupole.
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