Friday 13 February 2009

Opus #24

31 décembre, le matin.
Ah ils vont voir de quel bois je me chauffe! Me traiter de la sorte, m'insulter, traîner mon œuvre dans la boue, m'humilier ainsi! Si je ne me retenais pas, je tuerais un à un ces soi-disant journalistes incompétents, ces abrutis de bas de plafond, ces barbares qui ne comprennent rien à l'art, qui ne savent pas voir la vie et la mort dans toute leur splendeur alors qu'elle est affiché en rouge carmin sous leur nez. Me rabaisser à un vulgaire tueur à la sauvette sans véritable méthode, sans véritable dessein. Mais ils n'ont rien compris! Rien! Ces incapables affirment tous que le meurtre d'hier matin n'est pas de mon fait, que « les entailles sont grossières » « la minutie dont il fait généralement preuve ne se retrouve pas ici », que « ceci n'est qu'une pâle copie, qu'une imitation mal équarrie du tueur qui sévit depuis plusieurs mois déjà. » Je vais devoir employer les grands moyens, leur montrer toute mon envergure, toute la magnitude de mon grand œuvre. Lorsqu'ils le verront étalé à leur face incrédule ils seront forcés de comprendre, ils se rendront à l'évidence qu'ils ont affaire à l'égal du diable. Ils me verront sur une montagne de crânes en être flamboyant noir et sang parce qu'alors je n'aurai plus d'humain que la silhouette.
Ils verront que le soleil ne peut plus briller au regard des atrocités que j'ai pu commettre, que Dieu ne peut exister pour les mêmes raisons. Pour parachever mon édifice de terreur je n'irai pas travailler ce matin, et j'irai là où je brûle à présent de porter mes pas. Le tableau que ces imbéciles n'ont su apprécier rue du panier fleuri, je vais en faire un plus beau, plus majestueux, plus terrifiant encore. Mon stratagème, que j'ai mis un an jour pour jour à ourdir, est d'une simplicité enfantine: il existe un restaurant bien particulier qui se situe sur une péniche amarrée le long du quai X. Certains soirs, comme ce soir, ils organisent un dîner plongés dans le noir. Ils font cela pour, paraît-il, ne compter que sur les sens que les gens ont tendances à minimiser et pour « voir » également ce que cela fait d'être privé de la vue. Le goût, la texture, l'odeur des aliments s'en trouveraient transformés complètement. C'est là-bas que j'irai. Royaume où les aveugles sont rois, et aussi serveurs ou serveuses. Équipé de lunettes de vision nocturne. Lorsque je les ai vues sur l'étal de la brocante, j'ai tout de suite pensé à cette endroit, à cette nuit d'horreur. J'en ai souvent rêvé. M'introduire ne devrait pas être le plus difficile, en revanche parvenir à tuer la vingtaine de couples qui s'y trouve sans éveiller les soupçons, plus les membres du personnel, ça c'est le véritable défi. Oui, ce sera belle et bien une nuit d'exception, une nuit d'épouvante. Il est enfin temps de la vivre. Le temps de me préparer, et je leur montre alors mon véritable visage, je leur dévoile la vérité, puisqu'il sont incapables de la voir par eux-mêmes.

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