Thursday 10 June 2010

At the Dead of Night


  
Now I have to fight the days without her
without the feel of her skin
the radiance of her lips in the sun
without her lock of hair in my face
walking on the strand.

I have to forget everything she meant to me
try not to think about the memories
not to remember what she meant
when she said she loved me
and when she didn't.

I have to forget the tears and the doubt,
the pain throbbing behind the ribs.

I have to combat all these, and the rest,
the sleepless nights and the fact
that I would give everything –
everything for her, to have her back,
to see her smile one last time.

Now I have to fight the sorrow
the long days and the lonely nights
the remembrance of what she brought me
when I was nothing and down in the gutter
when she meant the world

Now that she means so much more than that.

Now I have to live without her laugh
without her dark pupils fixing me
first thing in the morning – her smile –
her smell – I could die for her.

God I long for her, to find her,
to live again and see the sun as it once was
what matters more than this?
Nothing. Nothing.

Every single day I have to fight,
every time I have to wake up
and go to work, live an ordinary life.
Every minute a pain boring through me
her smile a persistence in my sight.

Blurring everything, tinging every single thing.

I wish so many things, that we were closer
that I didn't have to open my eyelids.
That I could lose control and fly to her
across the deserts and the oceans
where she belongs, the place of my dreams.

Now she and I have to retrieve a little dignity.

She has suffered and must find peace
wherever it is – our paths meeting perhaps
one day – looking for repose
a haven where she would dwell
and sleep and live.

Now I have to fight the days without anything
to remind me of her, no token of love
no letter, nothing but ethereal images
mindscape of pain.

But I wouldn't trade these images
for all the gold in the world,
just for one smile across a platform,
she forever lost to me.

And perhaps at the dead of night
she will come to me in a dream
enshrouded in white flashes
taking my chin in her pale hands
and looking at me, mute and caring
and perhaps, at the dead of night,
loving.

And then I wouldn't have to fight
for I would know that pain is a friend
to learn lessons from,
not some fiend to be afraid of.

That her smile, her very breath
are godsent, that I have lived what
so many only dream of
at the dead of night
and never experience.

That all the beautiful things I have lived
with her, and in some way still do,
were real and that reality is all we have
all we crave and what we fear the most

for reality, at the dead of night,
is the only thing that matters more than us,
than what we may represent.

Now, at the dead of night, I think about her
and do not fear any darkness, nor pain.
And if perhaps some trace of melancholy
is bound to persist, at the dead of night,
then she shall come and smile at me,
relieving me from the vivid images
with a soothing and, perhaps, loving
hand.

And I will stop fighting.
 

Wednesday 9 June 2010

Nouvel aspect

Un poil plus sobre, peut-être, que l'ancien. Epuré diraient certain(e)s (ou "Eh purée!").

Je n'arrive pas à me débarrasser de ce cadre blanc autour du "Star rating", pourtant bel instrument de mesure, mais je ne désespère pas "breaker le HTML" tôt ou tard (Au secouuuuuuuuuuuuuuuuuuurs Binoooooooooooooo!)

Vous me dîtes ce que vous en pensez? Merci!

A bientôt à toutes et à tous.

Rodolphe

L'empreinte de l'eau


j’ai besoin de toi comme de l’eau
comme un errant au mitan du désert

ta pensée me sert la gorge
tu es la brise sur mon visage
le bruissement des arbres le soir
la pluie sur mon paletot
la bruine en haute mer
le cri des mouettes sur la jetée
le soleil froid du matin d’hiver
le silence quand il neige
le silence quand vient l’été,
cet escalier de Jacob
qui claire-voise et englobe
ce tranquille pied-de-vent
qui transperce les nuages
ce vol furieux de crambe
cette immense nuit d’étoiles
qui résiste au sommeil et au vent
cet orage enclume qui tonne
ces larges feuilles d’automne
qui mosaïquent les allées
des bigarrures de leurs voiles
cet arc-en-ciel qui s’achève au regard
sur le bord d’une colline
cette giboulée sans aucun égard
aux voyageurs qui lambinent
ce lavoir isolé maintenant
ces balades de florions dans le souffle
ces pattes de chat sur l’étang
ce clydesdale qui à la charrue s’essouffle
ce vol d’hirondelles au soir
clamant des vêpres d’ivoire
ce héron immobile en les eaux
altier confondu en les roseaux
cette aurore qui n’en finit pas
cette nuit calme et triste et là
ces lents nuages diaphanés de soleil
qui passent sur l’horizon
ce crépuscule fasciné de vermeils
diaprant toutes les maisons,
les éclats de voix des autans
le premier bourgeon de printemps
les larmes de Tristesses
l’assoupissement las, intranquille

et parfois lorsqu’aux soirs de grésil
l’ennui étreint la poitrine et empèse
les vestiges des pensées qui me furent
voilent le regard d’un fin brouillard
et pourtant lorsqu’aux soirs adoucis
il n’y a plus qu’un seul ennemi
sur le champ de bataille déserté
on ne voit pas non plus la fin de la nuit
on ne sait à quoi l’on a résisté
on ne voit pas non plus que l’on vit
et que l’on reçoit tous les jours
de ces dons qui apparaissent vains
et qui sont comme une pluie d’été
sur nos bistres photos de faubourg
et souvent il y a quelque chose de doux
et de secret à regarder la lune
sombrer derrière une montagne
de nuages sombres et luisants comme l’encre
semblables à des navires dépourvus d’ancres
oui, souvent, il y a quelque chose de doux
et souvent l’on croit avoir été seul
et l’on brode tristement un linceul
dans la musicalité des jours
et des nuits de veille ininterrompue
l’on croit n’avoir besoin que d’amour

alors que l’eau vient à manquer
et l’eau, lorsqu’on n’en a plus,
le vertige grésille les oreilles
et l’on voit les labyrinthes de l’âme
dans les remous d’un barrage
et jamais dans nos reflets
et sinistrement nous comptons nos âges
et ainsi nous passons nos temps
à rêvasser de vies consumées
aux heures bleues présumées
à ne vivre que des bouts d’instants
à ne rien vouloir d’autre que soi-même
un reflet si noir et parfois si blême
et l’on ne voit pas l’eau, l’eau
qui est présente, partout,
à chacun de nos pas lourdauds
dont nous ne sentons plus le pouls
qui s’offre à nos sens émoussés
par tant d’errance évincés
par tant d’oisiveté hebdomadaire
plantés là avec tout et rien à faire
et ainsi nous ne faisons rien qui en vaille la peine

et ainsi saumâtrent l’envie et la haine
et pourtant nous vivons
dans la froideur de nos maisons
où de dégoût le soleil s’absente
et d’où ennuyés et tristes et faux
nous croyons contempler un monde
qui n’a pas été fait pour nous
qui donne et prend à coups de faux
qui nous ampute et nous émonde
et qui, finalement, s’en fout ;
ce qui nous fait défaut – c’est un but;
nous pleurons misérables et incompris
nous mourons dans le dénuement
parce que l’eau a et n’a pas de prix
et souvent l’eau coule autre part
sourd d’un autre continent
abonde en lacs phréatiques épars,
il faut prendre la peine de l’écouter s’écouler,
nos corps assoiffés crient grâce
la miséricorde des jours ne vient pas
ne peut venir tant qu’on ne pleure pas
il ne faut pas que jeunesse se passe
il faut pourtant aller là où tout arrive
et où tout vit et rit et jaillit
comme une fontaine sous le lierre

il y a toujours une autre rive
une autre passe pour voguer en vie
pourquoi attendre alors qu’un monde est à portée
de main crispée en une lente agonie indolore
l’hésitation plus que l’inaction calcifie
nos articulations effarouchées
fragilisées par l’appréhension de la mort,
nous subissons cette soif intarissable
et le silence autour de nous cultivé
comme si de rien n’était
nous ne le voyons plus
nous le laissons contraindre
nous qui lui avons donné naissance
et l’ennui accable et cesse de surprendre
il faudrait ouvrir les portes de son être
en grand
pour laisser entrer les papillons
et les rayons de soleil
et la pluie souvent
mouiller le carrelage de nos aîtres
prendre le temps de regarder
dans l’iris de nos yeux les couleurs
les mondes qui couvent silencieux
et les si lents cieux
ne seraient plus
comme par enchantement
couverts d’épais nuages annonciateurs
d’hécatombes
de sacrifices inutiles
et desquels on ne connaît rien
pas même les motifs

et nous restons oisifs
devant les trombes
sans oser mouiller ces mains
désormais si futiles
que des occasions de chute
alors qu’elles équarrissent le brut
assouplissent le grain
et jointes prient et saluent
et l’on ne se tient plus par la main
comme le font les amoureux qui ne sont plus,

tu es le chant de l’averse au carreau
ce plissement d’yeux en plein soleil,
il nous faut prendre le large
appareiller nos maigres esquifs
et braver l’inconnu
l’inconnu
grand nom de ceux qui n’ouvrent pas les yeux
alors autant cesser de battre
cœur et paupières
tout cela reste superflu
et nous emmène intouchables dans le secret des tombes
qui elles ne parlent pas plus,
il faut apprendre à respirer avec le ventre
l’odeur du terreau fraîchement arrosé
les senteurs d’herbe coupée au bord des chemins
le parfum de la terre imbibée d’orage
de l’encens enivrant presque trop
malgré cela le cœur flétrit et c’est le pire
mieux vaut une cicatrice
qu’une flétrissure car c’est la preuve
que l’on a vécu pour quelqu’un
ou quelque chose
qui nous dépassait tellement
qu’on n’a pas eu peur de se brûler les doigts
à son contact

une cicatrice recueille les mémoires
et mille blessures font un guerrier
et une blessure fait un assoiffé
ce voir, cet observer, ce contempler
que nous n’usons plus
que pour feuilleter sans voir
les pages de nos existences
insipides et incolores et inodores
la liquidité nous fait défaut
nous étions semblables à l’eau
et corrompus par le chagrin
l’ennui, le sommeil, le fantasme de faire
nous n’avons pas le faire
impotents et hagards
créer nous ne savons plus
le vivre avons oublié
l’observer un frein
le boire une mauvaise habitude passée

et parfois d’un matin paisible
on retire une joie qu’on feint d’ignorer
jusqu’à ce qu’elle perce
la croûte de l’indifférence
épaissie par accrétion
d'incuriosité et de carnets de chèque
et de nous il ne reste rien qu’un champ de ruines
invisitable parce qu’insalubre
nous devenons invisibles
et nous perdons nos reflets
et au fur de nos jours moribonds
tout vient flétrir le cœur
et les poèmes pourrissent dans les placards
se périment sans sépulture
ni même de cénotaphe anonymé ou biffé
alors qu’un poème est une échelle
pour se dé-tacher de l’ennui
et aide l’œil à voir
le corps à se modeler
accoutume l’oreille au bruit oublié de l’eau
sur les toits gris des capitales

les poèmes vivent de nous-mêmes
fantoches paresseux et atrabilaires
esprits frappeurs des relations humaines
liquéfient ce sang qui coagule
et bouche nos artères
pourtant les poèmes hantent les tiroirs
ou brûlent dans les fours ;

nous faisons état des jours
nous les comptons
histoire d’être sûrs
répertoriés bien au chaud dans nos mémoires
et les années passent sans heurts
évitant au mieux la peur
l’insécurité de demain
de l’autre son voisin
et pourtant la torture du quotidien
tiraille nos esprits amuïs tête baissée
nous nous sommes changés en statues de sel
redoutant la première ondée
alors que c’est au milieu de l’océan que l’on vit vraiment
que l’on est vraiment
les abysses par-dessous nous
les empyrées, quels qu’ils soient,
par-dessus et l’eau desquamant
nettoyant les dartres du reclure qu’on s’inflige
il n’y a que là, à cet instant
au beau milieu de l’océan
que l’on est en sécurité
et la soif étanchée malgré le sel marin
qui a brûlé maints visages mais jamais un cœur
un vol d’albatros roulant avec les vagues
et la promesse de la terre à l’horizon
malgré les buffets et les horions
des aquilons
un cap à garder sans autre boussole
que celle du cœur
là où voudra bien nous mener la soif
vers un pégase frappant le sol
le cœur une musique jouée en boucle
pour concentrer l’attention
sur les pulsations des mains et des pieds
et parfois s’abandonner à l’élément
scruter l’intérieur de sa poitrine
et compter l’intervalle des battements
et soigner sa respiration pour ne pas s’étourdir
et puis dans l’océan on ne parvient plus
à distinguer ni les larmes ni la sueur
des embruns alors on finit
par ne plus en avoir rien à faire

et l’impasse nous guette d’un coin de rue
choisi par l’éteigneur de lampadaire
la tristesse semble parfois la seule issue, oui,
rechercher la tristesse si nécessaire
pendant un temps
voire le désespoir, oui,
car le désespoir fait avancer là où l’apathie traîne
le désespoir libère là où la peur lie
et permet aussi d’aller
là où un navire s’est déhalé
mille verstes plus loin plus près du tout
rien qu’avec l’erre
et au bout :
la terre.

chasser les réduves de nos aîtres
secourir la matité sereine des peut-êtres
en la nacrant de maintenants
empreinter la route de nos poèmes de nos doigts
croiser nos mots en un long chant
qui aurait toutes les nuances de bleu
et le toucher froid d’une bille de terre
façonnée on ne sait comment.

pourtant tu es là
et pour te voir, il me faut ouvrir les yeux
et m’apercevoir que tu es shamayim
que tu es ewig, spiritum meum
tu es la main du lapithe combattant le centaure
le Shā, le Bereshit des histoires
le pschent de Mout la Grande, Dame de l’Achérou
la draperie pour une figure assise
le regard de l’indicible fils de Roger
la ville cachée sur le plastron de Saint Michel
le rêve de Rôsei
le yokote mince mais décisif
le ciel des prières du soir
la riche tristesse du violon
tout à la fois clément et violent
le chéneau et la pluie et l’impétus
le besoin de parler au noir de la nuit
de dire les maux de l’âme
ce qui fait traverser les steppes de l’abattement
qui nous fait habitants perclus du schwa
et pourtant on sait ce qui est nécessaire
et pourtant on ne sait pas ce que l’on veut
et pourtant on ne fait pas ce qu’il faut
on hésite on tergiverse
en attendant l’averse
qui ne vient pas du ciel mais de nous
incongrus faiseurs de pluie
dansant sur des échardes

et l’attente nous surit
et si l’on n’y prend garde
rien ne survit
l’ennui sclérose
rend stérile et résèque ces parties
convoitées de notre humanité
que seuls possèdent les fous
la spontanéité
l’imagination
le calme
et nous faisons et nous faisons tout
en désordre sans arriver à bien
faire ce qui est bien pour soi
ne pas perdre son temps
tout en le prenant
car parfois le repos est préférable
à la course à perdre haleine
car parfois
on la perd

achopper nous souvenirs à nos rêves
ébaucher l’impensable sur les prémonitions

tu es ce rire au sortir d’une sieste
ce grincement lancinant de balançoire
cette eau tiédie au soleil d’été
se gorger d’eau jusqu’à étouffer
et ne rien regretter qu’un
dernier regard à la hâte
en arrière
et toi, tu es le souffle
le shamal des nautoniers
l’harmattan des nations
le souffle qui vient à nous manquer
lorsque l’on a désappris à respirer
lorsque la tête tourne et que le cœur est gros
le vent rabattant les sentiments en place
le soupir des incompris
le soupir d’un demi-ton d’un violon
le dernier soupir ondin de Martin Eden ;
tu es le construire un rêve ensemble
la bâtisseuse de songes
la grande géomètre à son grand œuvre

regarde autour de toi et tu verras mon cœur
perdu dans les combes de milles imaginaires
renverser les mappemondes de Sesshu
regarde autour de toi et tu verras cents desseins
venir s’esquisser en les sinueux chemins
et pourtant aucune route aboutir
aucun dessin prendre consistance
toutes chimères miragées sans substances
cents espoirs avortés sous le sombre dôme
d’un geste en instance de devenir
claustré dans les halliers impénétrables
d’une volition hors d’atteinte
derrière les ramées du possible
un geste de la main clouée au tolet
d’une yole livide qui suffirait
à imprimer une erre et un temps
un but aoratique cherché dès lors
avec l’énergie du désespoir,
accueilli auparavant comme un étranger
rompant le pain silent du soir.

regarde autour de toi et contemple
et voit cent mille exemples
et amarre ta main à la mienne
et toue mon existence à travers l’étiage
à travers les restes de naufrages
et si cela commande trop de peine
alors sois le soleil et luit
alors sois le sommeil
alors sois la pluie
car cela ne te demande pas d’autre effort
que d’être et inonde ce port bréhaigne
pour qu’enfin de mes mains je puisse ramer.
ai-je de la vie plus peur que de la mort
plus frileux et soudain plus casanier
parce que le voyage d’esprit est plus sûr
que ses rivages sont plus aisément fréquentables ?
il me faudra répondre à cette question
tôt ou tard.
n’ai-je pas d’autre dictame que ton cœur ?
d’autre réceptacle à ce qui fomente
en mon esprit abêti de souffrance ?
d’autre moyen d’apaiser ma peur ?
d’autre issue que de sinistres sentes ?
d’autre poison que l’absence ?

j’ai besoin de toi comme de l’aube
j’ai besoin de toi comme de la nuit
comme du pain, comme du froid,
comme de la peur, comme de l’espoir,
comme de la tristesse, comme des cauchemars
comme des rêves
j’ai besoin de toi comme des questions
j’ai besoin de toi comme de l’été
j’ai besoin de toi comme du soleil
j’ai besoin de toi comme de l’eau
j’ai besoin d’eau
j’ai soif

Tuesday 8 June 2010

Les mots perdus


Rien ne presse
Allons nous-en vite
Il faut aller de l’avant
vivre
écrire
lire
voyager
contempler
Ecouter la solution
prendre goût aux mystères
penser                                                                les raisons
écouter                                                               les autres
parler                                                                  de tout
Sentir                                                                  l’univers
                        simplement
                        ce qu’on observe
                        les réponses
                        sa proposition pourtant
                        pleinement


on s’ennuie
Rien ne vient
Tout perd de sa saveur une fois que l’on n’y pense plus
Ne pas perdre de vue              la fin
Détailler l’essentiel
Subir l’impondérable et ne pas le créer
Lire l’ancien
Délaisser le nouveau
Vaincre l’inutile, s’en rendre maître
l’étouffer
Ne pas
            regretter
                          en connaissance de cause
Le monde appartient aux impenseurs
                       [Bienheureux les aveugles d’esprits]
           L’erreur est humaine
                                                       parce que nous sommes ignorants
                       La pensée ne fait pas le poète.

Tous bien portants Tous infirmes
pas de mérite d’être humain
incapables et obstinés
vénérant les ombres
           lâche
                                                                                                                              veule
                                                          misérable
                                                          homme inhumain

           Trompeur et décevant
                       enchaîné de son plein gré de ses propres mains
                                        à lui-même
                            irréfléchi hors le miroir ou l’onde


                       vies chimères, gâchées
                                Je n’ai plus la patience

Monday 7 June 2010

Ur bleiz

Le Loup vient et s'assied, les deux jambes dressées,
Par leurs ongles crochus dans le sable enfoncées.
Il s'est jugé perdu, puisqu'il était surpris,
Sa retraite coupée et tous ses chemins pris,
Alors il a saisi, dans sa gueule brûlante,
Du chien le plus hardi la gorge pantelante,
Et n'a pas desserré ses mâchoires de fer,
Malgré nos coups de feu, qui traversaient sa chair,
Et nos couteaux aigus qui, comme des tenailles,
Se croisaient en plongeant dans ses larges entrailles,
Jusqu'au dernier moment où le chien étranglé,
Mort longtemps avant lui, sous ses pieds a roulé.
Le Loup le quitte alors et puis il nous regarde.
Les couteaux lui restaient au flanc jusqu'à la garde,
Le clouaient au gazon tout baigné dans son sang;
Nos fusils l'entouraient en sinistre croissant.
Il nous regarde encore, ensuite il se recouche,
Tout en léchant le sang répandu sur sa bouche,
Et, sans daigner savoir comment il a péri,
Refermant ses grands yeux, meurt sans jeter un cri.


J'ai reposé mon front sur mon fusil sans poudre,
Me prenant à penser, et n'ai pu me résoudre
A poursuivre sa Louve et ses fils qui, tous trois,
Avaient voulu l'attendre, et, comme je le crois,
Sans ses deux louveteaux, la belle et sombre veuve
Ne l'eut pas laissé seul subir la grande épreuve;
Mais son devoir était de les sauver, afin
De pouvoir leur apprendre à bien souffrir la faim,
A ne jamais entrer dans le pacte des villes,
Que l'homme a fait avec les animaux serviles
Qui chassent devant lui, pour avoir le coucher,
Les premiers possesseurs du bois et du rocher.
Hélas! ai-je pensé, malgré ce grand nom d'Hommes,
Que j'ai honte de nous , débiles que nous sommes!
Comment on doit quitter la vie et tous ses maux,
C'est vous qui le savez sublimes animaux.
A voir ce que l'on fut sur terre et ce qu'on laisse,
Seul le silence est grand; tout le reste est faiblesse.
--Ah! je t'ai bien compris, sauvage voyageur,
Et ton dernier regard m'est allé jusqu'au coeur.
Il disait: " Si tu peux, fais que ton âme arrive,
A force de rester studieuse et pensive,
Jusqu'à ce haut degré de stoïque fierté
Où, naissant dans les bois, j'ai tout d'abord monté.
Gémir, pleurer prier est également lâche.
Fais énergiquement ta longue et lourde tâche
Dans la voie où le sort a voulu t'appeler,
Puis, après, comme moi, souffre et meurs sans parler."

Alfred de Vigny, La mort du loup,  1838

LE MANQUE Mourir à Chartres (d'ores et déjà mon hymne de coeur - Un grand MERCI à Caro!)

Friday 4 June 2010

"I must be gone and live, or stay and die."
Romeo and Juliet, III, 5, 11.

Thursday 3 June 2010

Jour de pluie


  
Voir les noirs nuages former une montagne à l'horizon.
Se dire qu'il va pleuvoir et appréhender ou s'en réjouir.
Rester bien à l'abri, ou n'y trouver aucune raison.
Savourer l'air moite et tendu, le temps qui s'étire.
Peut-être en arriver à se demander si l'on
se demandera si l'on a fait le bon choix,
Celui de rester et mourir
ou celui de partir et vivre.
Pourtant, il ne reste plus qu'à

Courir sous la pluie battante,
vivre à perdre haleine
quand tout vaut la peine.
Il n'y a plus d'attente.

Tout est à faire.

Wednesday 2 June 2010

Haïku sous la pluie

 
L'eau, tombée en pluie,
se teinte sur le rebord de la céramique -
le thé est bientôt prêt.

Tuesday 1 June 2010

Histoire dont vous êtes les héros #8


Vous pouvez essayer de vous enfuir. Peut-être y a-t-il assez d'argent dans l'enveloppe pour partir? Qui ne tente rien n'a rien! Fébrile, vous regardez votre montre. Il ne vous reste plus qu'à feindre la nausée – ce qui ne devrait effectivement pas tarder – selon le plan du Boucher slave. Voilà que, bien inconsciemment, vous vous mettez à réfléchir. Vous fouillez dans votre tiroir et en extrayez une enveloppe marron sensiblement de la même taille que la plus grande. Vous vous demandez s'ils savent exactement ce que contenait le coffre, mais vous vous sentez de taille pour les berner. Vous voilà prêt: vous ouvrez l'enveloppe. Une liasse de feuilles A4 avec tout un tas de numéros et de noms. Comme c'est un peu votre métier, vous saisissez tout de suite que ce sont des comptes bancaires en...suisse peut-être, et qu'un sacré paquet d'argent transit dessus. Vous voilà fixé. Au tour de la petite enveloppe à présent. Rien d'autre qu'un petit bout de papier, vraisemblablement arraché d'une nappe comme dans les brasseries l'été, sur lequel figure un nom bizarre, ou un mot, « M ektoub » et un numéro, peut-être de téléphone.
Il reste la clef. Une clef basique. De boîtes aux lettres, peut-être, quoiqu'un peu longue.
Sans l'avoir véritablement décidé, vous vous retrouvez devant la photocopieuse qui avale la liasse et la ressort dupliquée. Vous ne croisez personne alors que vous retournez dans votre bureau, replacez l'original dans la nouvelle enveloppe.
Il ne vous reste plus qu'à savoir où mettre le numéro et la clef. Ni une ni deux, vous glissez le tout – photocopies, clef, morceau de papier – dans une autre enveloppe marron, écrivez l'adresse de vos parents dessus et la mettez sur votre bureau. Elle partira au courrier en fin d'après-midi. C'est à ce moment qu'entre la comptable. Vous ne l'aviez jamais remarqué, mais il y a une sorte de beauté indéfinissable en elle. Ses traits sont fins, elle est élancée mais ses hanches se laissent deviner sous ses vêtements un peu lâches. Elle a de beaux cheveux noirs, fins, ramenés en chignon sur le haut de la tête qu'elle porte droite, bien maintenue sur ses épaules carrées. Un rien strict. Elle vous demande si vous allez bien, vous êtes pâle comme un linge. Vous lui demandez si la secrétaire est là, pour l'avertir que bien que soyez venu, vous ne vous sentez pas bien. Vous allez rentrer chez vous. La comptable se balance sur un pied et son déhanché attire votre regard. La secrétaire est en réunion avec le patron, si vous voulez elle fera passer le message. Même pas besoin de feindre. C'est pas beau ça? Vous la remerciez, et pensez pour vous-même qu'une fois cette histoire de fous furieux terminée, vous l'inviteriez bien à déjeuner, histoire de faire plus ample connaissance. En attendant, vos yeux s'attardent sur ses jambes, ou est-ce plus haut, alors qu'elle quitte votre bureau en vous souhaitant de vous remettre rapidement. Un joli sourire.

Qui contraste nettement avec les visages qui vous scrutent alors que vous montez dans la voiture du Boucher slave, garée au coin de la rue. Il y a trois gorilles à l'arrière de la Volvo. Tous habillés avec de longs manteaux noirs au col relevé. Vous ne pouvez vous empêcher de dire « Salut la Gestapo! » alors que leurs mines pas tibulaires pour deux sous vous font froid dans le dos. Vous vous demandez ce qui peut bien motiver une telle arrogance de votre part.
« Assieds-toi au lieu de dire des conneries. Ton patron se doute de quelque chose? » Visiblement, le Boucher n'est pas là pour discuter le bout de gras.
« Je n'ai vu que la comptable. La secrétaire n'était pas là.
_ Emir! » Le gorille du milieu est visiblement tendu, prêt à en découdre. Il sert ses poings et ses articulations sont blanches, les veines saillantes.
« Mais ils parlent en plus!
_ Ta gueule. Ils sont énervés alors je te conseille de pas les chercher. Tu as tout? L'enveloppe, c'est bien. Et il devait y avoir une clef. Une petite clef. Elle est où ?
_ Une clef ? J'ai rien vu, et j'ai tout bien regardé. » L'autre excité derrière pose une question, rapidement. Il parle comme il doit tirer avec une Kalachnikov, lui. Emir répond « Нет ». S'ensuit une bousculade dans le mètre cube de l'habitacle. Vous sentez l'odeur du cuir prêt de votre visage. Vous ne voyez plus rien. Vous ne vous sentez pas très à l'aise, pour dire le moins. Trop de corps autour de vous, sur vous. C'est pesant, lourd de reproches. Vous sentez même des mains agripper votre cou. C'est alors que dans la confusion des bras et des pieds qui volent un peu partout, vous voyez le poing d'Emir s'abattre au milieu de la masse. Un « Argh » vient mettre un terme au joyeux bordel. Vous voyez de nouveau. Ils vont finir par alerter les passants avec leurs conneries.
« Andreï, Делайте не дерьмо! » L'autre bougre a le nez en sang. Il est plus calme, bizarrement. Il a sorti un étrange mouchoir brodé, ouvragé même. D'un blanc immaculé. Un souvenir du pays, sans aucun doute. Plus trop immaculé maintenant.
« Bon, pas de panique. Tu es certain qu'il y avait pas de clef?
_ Certain. Elle sert à quoi cette clef?
_ A fermer ton cercueil si on met pas la main dessus. Essaie de rien dire pendant deux minutes. » Là-dessus, il descend de voiture, vous laissant avec les joyeux drilles. Et dire que vous pensiez il y a trente secondes que l'ambiance était tendue. Vous espérez, vous agrippant au siège d'une main, l'autre sur la poignée de la porte, qu'Emir ne va pas passer trois heures au téléphone. D'ailleurs, qui peut-il bien appeler? Vous aimeriez bien regarder devant vous, ignorer l'ignorance brutale assise derrière vous, mais il semble qu'un démon bien impertinent ait pris possession de vous. Vous vous retournez, un sourire fendu jusqu'aux oreilles, découvrant vos belles dents qu'un orthodontiste chevronné et d'une patience d'ange a mis plusieurs années à refaçonner pour qu'elles restent toutes dans votre bouche – dents dont vous ne doutez pas perdre le contrôle si vous continuez à titiller vos amis d'un jour. Trois paires d'yeux vous fixent avec autant d'amicalité qu'une roche prête à s'effondrer sur vous. Vous ne savez pas ce qui les retient. Ils semblent se faire la même réflexion. Vous les voyez, comme d'un seul homo brutus castagnus, avancer les épaules vers vous. Ils se remettent dos à la banquette alors que leur chef se remet derrière le volant.
« Je te ramène chez toi. On t'appellera plus tard.
_ Je suis pas libre? Vous m'aviez dit –
_ Tu es vivant, à ce que je sache. Tant qu'on n'a pas la clef, on peut rien faire. Il va falloir que tu retournes au coffre, mais pas aujourd'hui. En plus, on n'en a pas tout à fait fini avec toi. »
Le trajet se fait sans encombres, mais vous vous sentez rougir. Est-ce la chaleur humaine qui ne vous sied pas? Vous avez mal calculé. Vous êtes dans la panade. La clef est en partance pour le Poitou. Alors qu'il vous dépose au pied de votre immeuble, Emir se tourne vers vous:
« Pas de blague, James Bond, si tu appelles la police ou si tu essaies de me jouer un tour, je te ferai regretter ça toute ta vie, longue ou courte. » Vous acquiescez du chef, l'estomac juste derrière vos amygdales que, il n'y a pas si longtemps, vous étiez fier d'avoir conservé.
De retour dans votre appartement où rien n'a bougé – même leur matériel est resté – vous examinez les possibilités qui s'offrent à vous.

Habits

I am a man of habits I got to this conclusion because I flash-realised that I am hoping that someone, someday will see the patterns the rou...