Wednesday, 5 June 2013

L'avancée du désert



Souvent, on est pétri de cette infinie certitude de ne rien savoir.
Poursuivi, on est acculé à l'immensité du désert,
hagard et pantelant, comme on le serait dos à un mur.
Même ceux qui pensent n'être point nomades errent.

Pourtant, on sait bien quelque chose qui en vaut la peine.
Pourtant on saurait mieux se cacher dans la combe d'une dune
qu'au plus profond des hypogées dans les abysses chthoniennes
Pourtant on contemple, on s'attache et l'on aime à enfouir ses racines.

clarténèbres



demaincision de mon âmertume

t'écrire aujourd'huis-clos

involonterrassé instantanémensonge

hier tumeures sanguinavouée

claudiquand l'ennuit est jour

à voir les paupières ouvertes de rage

bultime tabula rasade de tristesse

ivrenaissant de noirceur de lait

jour se levanticipateur ouranostalgique

Monday, 3 June 2013

Blinkered


"In the face of suffering, one has no right to turn away, not to see."

Elie Wiesel, writer, Nobel laureate (b. 1928)

Sunday, 2 June 2013

La fin



un matin on se réveille
et le cœur ne pèse plus
la veille semble moins absolue
la lassitude lavée des artères
les cernes moins creusés
le hâve de la figure moins blasé
l'on a dormi d'une traite
ni joyeux ni lugubre
en parfait équilibre
on sait alors que l'oubli est impossible
mais le nœud dans la gorge s'est défait
les mains paisibles sont déliées
la poitrine désempesée
on écoute les battements du coeur
apaisé, quand la plupart en ont peur
il y aura, bien entendu,
des sursauts de passion et d'espoir
mais on a lu, enfin, un "Au revoir."

Friday, 31 May 2013

Trois livres d'oubli



je t'ai oubliée dans les vapeurs d'alcool

mais tu es encore là. tu m'as fait dire de ces sales choses qui présagent d'une sale fin

et je suis encore là. pourtant je contemple le lourd bastaing

lui ne bougera pas. tu m'as fait pleurer de ces larmes avinées qui collent

et qui ne soulagent rien. j'ai de nouveau apprivoisé la soif de tout et la grande faim

et, surtout, tu m'as redonné l'enivrante envie de tout détruire

d'en finir avec tout dans ce temps de chien

avec la pluie, le pétrichor et les maudits andains

tu m'as insufflé l'ancienne envie de tout pétrir

de tout reconstruire car tu es même dans le vin,

dans le pain, dans le mauvais air, dans la lassitude et le fuir.

je t'ai oubliée le temps d'une soirée qui était prévue à cet effet

sachant de quelle couleur serait peint le lendemain

cet aujourd'hui imparfait

qui pèse autant que trois livres de lin.

je t'ai vomie dans la nuit.

mais tu es revenue. pourtant j'ai tout fui

sans reprendre terre.

tout est à refaire.

Rippling effect

 
"The words a father speaks to his children in the privacy of the home are not overheard at the time, but, as in whispering galleries, they will be clearly heard at the end and by posterity."

Jean Paul Richter, writer (1763-1825)
 

Wednesday, 29 May 2013

Metaphorical mountains


"On the mountains of truth you can never climb in vain: either you will reach a point higher up today, or you will be training your powers so that you will be able to climb higher tomorrow."

Friedrich Nietzsche, philosopher (1844-1900) 

Tuesday, 28 May 2013

haïku



descente en enfer en rappel
chute contrôlée dans les gouffres
plume d'un autre passé par-là

Monday, 27 May 2013

Spleen, 7 novembre 1880



Tout m'ennuie aujourd'hui. J'écarte mon rideau,
En haut ciel gris rayé d'une éternelle pluie,
En bas la rue où dans une brume de suie
Des ombres vont, glissant parmi les flaques d'eau.

Je regarde sans voir fouillant mon vieux cerveau,
Et machinalement sur la vitre ternie
Je fais du bout du doigt de la calligraphie.
Bah ! sortons, je verrai peut-être du nouveau.

Pas de livres parus. Passants bêtes. Personne.
Des fiacres, de la boue, et l'averse toujours...
Puis le soir et le gaz et je rentre à pas lourds...

Je mange, et bâille, et lis, rien ne me passionne...
Bah ! Couchons-nous. - Minuit. Une heure. Ah ! chacun dort !
Seul, je ne puis dormir et je m'ennuie encor.

Jules Laforgue (1860-1887)

Sunday, 26 May 2013

Matins



C'est encore un de ces matins où rien dans la vie n'a changé, où un laps de temps a juste passé. Un matin où l'on a envie de rien. Un matin avec un temps de chien, où l'on oscille entre hasard et nécessité, prendre part à la vie ou rester cloîtré. Un matin gris sur gris, rien sur rien. C'est pourtant lors d'un de ces matins que tout aurait dû exploser dans une cacophonie monstrueuse, car si l'on avait juste osé, la vie aurait été merveilleuse. Mais c'est un matin de chagrin.

Il faut être bien couard devant l'adversité pour ne pas vouloir fonder une réalité. Car un jour, on regrette nécessairement, on s'en veut, on serre les dents. On s'endort en pleurant. On se rend compte que c'est plus dur maintenant d'aller de l'avant, alors qu'on avait tout devant soi. On aurait pu, oui, être soi.

Mais au lieu de cela, on a choisi une autre voie.

Et on se réveille, on bâille, on s'étire, on regarde les corneilles tournoyer et bondir sur une toile fadasse et on se dit qu'on a manqué d'audace, on n'arrive pas à se dire de se lever car on ne voit pas bien par où prendre cette journée, on n'en voit pas la peine car on a trop de peines. Alors, la mort dans l'âme aussi grise que les nuages, la tête sous l'emprise de mirages, on se rendort sans trouver le sommeil, on ne sait plus bien si l'on veille, et l'on ne se tourne qu'un peu, seulement, de peur de toucher le froid du drap là où il y avait l'amant. On écrit des messages plein d'espoir que l'on garde dans un tiroir, que l'on n'enverra jamais, qui resteront là des années et qu'on finira par mettre au rebut quand on aura retrouvé un début. On broie du noir et on rejette du gris sombre. Le lit préfigure la tombe de la vieillesse, quand on sera gonflé de regrets et de tristesse. Les décombres de la vie alors encombreront les vestiges de l'ennui, et l'on repensera à ces matins sans nombres, ces longs matins sans ombres où l'on ne voyait rien de bien se profiler dans le lointain, et où l'on voulait baisser les bras. Mais on est encore là, sans trop savoir pour quoi.

Alors on se lève, on réchauffe son cœur et ses mains avec du thé et un peu de pain, on imagine les sacolèves mettre voile vers le levant. Les vents, propices auparavant, soufflent d'ores sur le ponant. Et on crève de voir qu'on a mis fin à son rêve. Le navire, resté amarré, moribonde sur les flots pers et l'on ouvre les volets et la vision se perd.

Pour l'heure, c'est un matin de poussière et la vie est derrière.

Haiku

leafblower season ablast one path, uncleared still, invites the pace on singing, saffron ginkgo leaves