Il n’y avait là que cette fillette rousse
Dans sa robe de tulle blanche, avec sa harpe
Sur l’épaule. Mais comment une fille si douce
Eût pu soutenir un si grand poids ? Son écharpe
Bleue pendait, frêle, alors que ses doigts s’agitaient.
Que dire de cette musique hors du temps ?
Mon regard d’une note à une autre volait,
Tout mon être imprégné de ces sons envoûtants.
La mélodie sortait des cordes et de ses doigts
La mélodie sortait de ses doigts et des cordes
La virtuose ne regardait pas vers moi
Mais elle m’envoyait sa leçon miséricorde.
Ses paupières closes égrenaient le rythme en grappe,
Ses doigts délicats frottaient, pinçaient et glissaient
Sur les membres filandreux de cette harpe,
Ses cheveux vibraient dans l’air sur les accents vrais.
Je regardais ses yeux me guider lancinant
Vers l’endroit où elle prenait la corde du pouce,
Et ses lèvres entrouvertes me murmurant
L’air lustral que sa harpe me jouait : l’ode douce.
Puis s’ensuivit un long silence monocorde.
La fillette éteinte, la harpe à ses côtés,
Laissait ses bras ballants, attendant quelqu’ordre
Du mécanisme de la clef que je tournais.
R.B. (29/10/2000)